MON PÈRE S'APPELAIT GEORGES ADELIN MAURICE
Par sa fille Monique Tomson.
Il était né
le 20 décembre 1912.
Je ne sais
en quelle année il avait fait son service militaire, mais je sais que c'était
dans les transmissions, les TTR : sa passion, c'était la radio.
Le 8 mai
1937, il épousait ma mère, en l'église Sainte-Marie des Anges, à Liège. En
voyage de noces, ils allèrent pour la première fois à la mer.
L'insouciance
et le bonheur furent de courte durée.
En août
1939, mon père fut rappelé : c'était la mobilisation générale. Le pays était
sur pied de guerre et bientôt, en guerre.
Il fut
affecté au fort d'Évegnée, qui faisait partie de la
ceinture fortifiée de Liège.
Le fort,
attaqué par les Allemands le 16 mai 1940, se rendit le 19 mai à 16 h.
Mon père fut
fait prisonnier, comme les autres. Et comme les autres, le voilà dans cette
colonne qui marche au pas – schnell, schnell ! - vers l'Allemagne et le stalag.
Et alors...
Incroyable
mais vrai, mon père a désobéi ! Est-ce à la faveur de la nuit ? En a-t-il
entraîné d'autres avec lui ? Toujours est-il que ce jeune homme qui n'avait
rien d'intrépide (mais je me trompe peut-être) faussa compagnie à ses
compagnons d'infortune, sauta dans un fossé et prit la poudre d'escampette. (d’après Michel Tomson,
le frère de Monique : "Il s'est laissé rouler dans un fossé en
compagnie d'un ami, le garagiste Georges Braibant,
qui avait son garage au coin de la rue d'Angleterre, face à l'épicerie
Denis.")
C'est ainsi
que mon père est entré dans la légende familiale et dans la Résistance. (Ma
mère disait : « Quand ton père était caché. »)
C'est ainsi
que, plus tard, j'ai été conçue alors qu'il était censé se trouver à des
centaines de kilomètres de sa chère et tendre... Ce qui fit jaser.
Enfant,
cette histoire m'épatait. Aujourd'hui encore, elle m'étonne. Le père que j'ai
connu n'avait rien d'un aventureux. Il respectait l'ordre établi et les
règlements. C'était la prudence incarnée. Il ne nous incitait jamais à prendre
des risques et s'il en prenait, lui, ils étaient toujours calculés. Peut-être
est-ce nous, ses enfants, qui lui avons fait perdre sa belle audace...
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