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Le lieutenant
Jacobs des Chasseurs Ardennais invité de la B.B.C. en août 1943 La vie
humaine est brève et vite oubliée malgré les souvenirs que l’on tente de sauvegarder
pour quelques années dans un écrit. Le
Chasseur Ardennais Victor Robert fit la campagne des 18 jours dans une chenillette
anti-char T 13. Voir à propos du T 13 le travail de Pierre Muller : Il raconta
donc dans son livre « L’âme des
chasseurs Ardennais » (paru aux éditions Draps en 1946) ses combats, la
reddition, son emprisonnement en Allemagne, sa libération puis son passage dans
l’Armée Secrète. Mais Il y décrit aussi longuement l’épopée de guerre du lieutenant
Jacobs. C’est le souvenir de cet officiera admiré par Victor Robert que nous
voulons évoquer ici. Victor
robert eut la chance d’être considéré comme néerlandophone et ainsi de pouvoir être
libéré après six mois de captivité. C’est ainsi qu’il est de retour en Belgique
le 18 janvier 1941. Un peu plus tard, à Bruxelles, au Club des Chasseurs
Ardennais, créé par le général Ley, Victor rencontre un
officier des Chasseurs Ardennais, Jacobs. M., qui lui semble de la trempe des
héros. Cet homme n’a pas participé à la campagne des 18 jours puisque,
instructeur des candidats motocyclistes, il avait été envoyé en France pour
continuer la formation de ses hommes mais revenu en Belgique lors de la
capitulation de la France, il rêva de continuer la lutte en rejoignant
l’Angleterre. Victor Robert conversa quelques fois à Bruxelles avec cet
officier qui, un beau jour, disparut sans laisser de traces. Victor Robert ne
le revit qu’après la guerre. Le lieutenant lui raconta alors son aventure que
Victor retranscrivit dans son livre. Deux fois, le lieutenant Jacobs avait échoué
à quitter la Belgique. Il passa même par la case prison à Charleroi puis à Saint-Gilles.
Un jour enfin, il parvint à Lille puis à Paris d’où il réussit à rejoindre la
ligne de démarcation. De Toulouse, il part avec des camarades vers les Pyrénées
qu’il essaie de franchir deux fois sans succès, d’abord à l’Est (Banyuls) puis
à l’ouest (Tour de Carol-Osseja). Enfin, aux
troisièmes essais, il réussit et passe la frontière près de Baunyuls
après avoir graissé la main des deux guides espagnols. Arrivés en Espagne, ils arrivent en gare de Llansa. Impossible de trouver un moyen de transport car les
gendarmes et gardes civiles sont là. Les fugitifs doivent se cacher avant de
reprendre la route nuitamment. Hélas, après avoir parcouru quelques kilomètres,
ils sont arrêtés. C’était le 23 avril 1942. Interrogé à Figueras, le lieutenant
Jacobs, se fait passer pour un officier canadien du nom de Hoyaux, évadé
d’Allemagne. Finalement le groupe est emmené à la prison de Barcelone. Le 10
mai 42, ils sont emmenés à Saragosse. Puis le 11 mai à Miranda. Le
camp de Miranda
est connu pour les conditions très dures de détention. Toutes les
nationalités sont représentées : Français, Polonais, Anglais, Hollandais
sans oublier les « Canadiens francophones » dont la plupart sont des faux Canadiens. Plus de
4.000 hommes vivent les uns sur les autres dans des conditions hygiéniques
déplorables. Hoyaux va y vivre un an en essayant de rester actif. Musicien, il
compose la belle marche des Evadés (1) pour procurer un peu de joie à ses
camarades. Il créé même une fraternelle des chasseurs Ardennais « Les
Sangliers…Miranda ». En janvier
1943, il participe à la grève de la faim pour attirer l’attention du monde sur
la situation des Mirandiens. Enfin le 22 mai 1943,
les Espagnols acceptent de libérer le « Canadien Hoyaux ». Le 24, il
s’embarque à Gibraltar à bord du paquebot américain « Santa Rosa ».
Quelques jours plus tard, il sera à Londres. En août 1943, la B.B.C. le réclame
et le lieutenant Hoyaux retrouvant son vrai nom et sa vraie nationalité est invité
à s’adresser à ses compatriotes par la voie des ondes. Voici son discours. « Chers Compatriotes, amis de la Belgique, C'est le cœur gonflé d'une joie profonde et bien
compréhensible que je vous adresse la parole de Londres. Récemment arrivé en Angleterre
; après avoir connu maintes situations troublantes et fait pas mal de prisons,
je suis heureux de pouvoir vous communiquer mes impressions. Je n’ai pas à vous
décrire le bonheur que l'on éprouve à se sentir enfin libre, à pouvoir respirer
une atmosphère non viciée par la présence constante d'un drap gris vermineux.
Ce bonheur, vous le concevez très bien, est d'ailleurs insuffisant, car c'est
en Belgique, n'est-il pas vrai, que nos cœurs veulent vibrer. C'est dans notre
pays libre de toute servitude que nous voulons vivre et que de raisons
n'avons-nous pas de l'aimer ! Je vous parle, mes frères, parce que je connais
très bien l'atmosphère de contrainte, de souffrances et de vexations que vous
avez à subir depuis la présence en notre pauvre Patrie d'un ennemi cruel qui, pour la seconde fois en un quart de
siècle, n'a pas hésité à violer nos Frontières. Je vous parle parce que j'ai
vécu comme vous sous la botte de cet envahisseur. J'ai connu comme vous les
privations, les appréhensions, le travail dans l'ombre. J'ai connu aussi la
captivité, les prisons sans jugement et des pérégrinations multiples de voyages
clandestins. Je vous parle enfin, parce que je voudrais que vous ressentiez comme
moi tout le bienfait, tout le soulagement que procure la conviction absolue
d'une fin prochaine au bénéfice de la cause de la Justice. Je vous dirai tout
d'abord que les nôtres, restés au Pays, ne doivent pas nous en vouloir si
parfois nous les laissons longtemps sans nouvelles : il vaut mieux être
discret. Soyez tous assurés que quantité de Belges se trouvent dans mon cas,
ayant presque tous rencontré de grandes difficultés au cours de leur voyage de
par l’hostilité des amis du fascisme mais tous, après un très long retard
parfois et à quelques très rares exceptions près, arrivent finalement indemnes
au terme de leur voyage, que ce soit en Angleterre, en Afrique ou ailleurs. Il
ne m'appartient pas d'examiner avec vous la marche des opérations militaires,
tant en Russie que dans le bassin méditerranéen. Vous savez comme moi que le
succès des Alliés est complet de part et d'autre, et vous suivez certainement
le Cours des évènements avec grand intérêt. Mais là où je voudrais souligner
toute l'importance de la chose, tant elle justifie les succès actuels et ceux à
venir, n'en doutez pas, c'est l’atmosphère de puissance qui se dégage partout
là où se trouvent les Alliés, tant sur mer et dans les airs que sur terre. Je suis également heureux de pouvoir vous
dire que les Belges de Londres ne restent pas inactifs. J'ai été très favorablement
impressionné à mon arrivée. Ils ne sont d'ailleurs qu'un petit nombre à Londres
même, car ils subissent pour la plupart un entrainement sévère à différents
endroits de Grande-Bretagne et au Canada, selon leur arme ou leur spécialité.
Et j'ai tout lieu de croire que, bientôt, vous aurez la joie de les revoir
tous. Je donnerais beaucoup en ce moment pour voir la tête de certains
collaborateurs que j'ai eu le désagrément de devoir côtoyer en 1941. Peut-être
il est vrai, ont-ils essayé de faire marche arrière depuis mon départ de
Belgique. Malheureusement pour eux, rien ne s'oublie. Non plus enviable à coup
sûr est le sort de certains traîtres passés directement au service de l'ennemi
et en particulier de la gestapo dès les premiers temps surtout des victoires
allemandes. Je connais quelques personnes qui n'ont pas hésité ainsi à dénoncer
des compatriotes. Je puis vous assurer, amis de Belgique, que tous les traîtres
de la sorte sont également connus ici et qu'ils ne manqueront pas d'êtres implacablement
châtiés où qu'ils soient. Je connais les procédés arbitraires de la gestapo
pour avoir eu à en souffrir. Je puis vous dire aussi que tous ses agents ne
sont pas les seuls criminels du genre. Il y a aussi les satellites. Dénoncer un
compatriote à l'ennemi est une lâche ignominie. Emprisonner ou interner
indéfiniment sans jugement des étranges en contradiction avec les lois
internationales de La Haye, est un autre crime. Mais tôt ou tard les coupables
ont toujours à subir les conséquences de leurs actes, fussent-ils simplement de
petits profiteurs de guerre. Patience, mes frères, le jour de la libération
approche. Notre fête nationale a été célébrée, je présume, pour la dernière
fois à Londres. Néanmoins, les derniers moments d'occupation de la Belgique
seront peut-être encore les plus durs. Je sais qu'il n’est pas toujours
possible de tromper entièrement l'occupant. Je sais aussi qu'il y a des risques
à courir. Mais la lutte dans l'ombre a son importance et n'est pas un des
moindres éléments avec lesquels les nazis ont à compter. Les Alliés accordent à
votre héroïque résistance une importance très grande. Aussi mes frères, ne
facilitez en rien tout ce qui peut être d'intérêt même médiocre pour l‘ennemi.
La délivrance de notre pays ne sera que plus accélérée. La machine allemande se
désagrège. Il ne faut pas l'aider à se maintenir mais faire en sorte qu'elle
soit rongée davantage. Pour terminer, je voudrais vous dire encore une fois
que, même s'il y a très longtemps que certains d'entre nous ont donné signe de
vie à leurs amis de Belgique, que ceux-ci sachent bien que nous ne les avons
pas oubliés, nous pensons à eux. C'est leur pensée qui nous conduit dans la
lutte contre l'envahisseur, contre l'ennemi commun de tous les peuples libres,
contre celui qui meurtrit à nouveau notre petit peuple loyal épris de justice
et de liberté, victime une fois de plus des desseins de la stratégie allemande. Lieutenant JACOBS, des Ch/A Victor Robert écrivit en 1946 son livre de
souvenirs « L’âme des chasseurs Ardennais ». C’est grâce à ce livre
que nous gardons le souvenir du lieutenant Jacobs. Les dernières lignes de
l’ouvrage lui sont consacrées : le lieutenant Jacobs que l’auteur admire
tant, a été chargé du commandement d’une compagnie de la brigade
« Yser » dans un cantonnement en Allemagne. Nous ne savons rien de
plus sur le lieutenant Jacobs et ne possédons aucune photo le représentant.
Nous espérons qu’un lecteur puisse un jour compléter cet article. Dr P. Loodts Note : 1)
La marche des
Evadés (Lieutenant Jacobs.M) |