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Les Cyclistes-Frontière de Visé les 10 et 11 Mai 1940[1] Ayant été invité à cette honorable assemblée pour y faire un commentaire sur les évènements de la défense de Visé en 1940 où participèrent les 31ème, 41ème, 51ème et 61ème Cie formant le IIème et IIIème Bataillons du 21ème Rég. Cy. Frontière et en toile de fond le rôle que jouèrent les ABRIS durant les journées des 10 et II mai 1940. C'est bien volontiers que j'ai accepté
en me permettant toutefois de réclamer votre indulgence sur la présentation de
mon exposé. Soldat milicien de la classe 1938, j'ai été affecté au Régiment Cycliste Frontière, régiment de formation récente... Après une période d'instruction très
poussée donnée au camp d'Elsenborn, le sort m'a désigné pour faire partie de la
21ème Cie du IIIème bataillon en garnison à Visé. Concernant les abris cela relève de l'initiative de feu Albert DEVEZE alors ministre de la défense nationale qui décida la construction d'un nombre d'abris de petit gabarit et de plus gros selon le secteur et l'importance de leurs missions. C'est ainsi que des petits abris jalonnèrent la frontière de l'Est depuis le Limbourg hollandais jusqu'au Grand-Duché de Luxembourg ces derniers, tendant la main si je puis m'exprimer ainsi à la ligne Maginot. Ces petits abris étaient communément appelés (Abris de flanquement). Je vais donc m'attarder tout d'abord sur la partie dite province de Liège appelée aussi ligne avancée de la P.F.L. ou position fortifiée de Liège. Celle-ci comprend 9 centres avec un total de 66 abris du Nord au Sud à savoir Beusdael (3) Hombourg (14) Henri-Chapelle (12) Grunhault (3) Dolhain (12) Jalhay (6) Hookay (2) Malmedy (6) et Stavelot (8) Il s'agit donc de petits abris dont les
dimensions sont les suivante 3m25 sur 3m 30 épaisseur des murs 40 à 60 cm de
béton armé avec une embrasure pour mitrailleuse. Aux quatre coins à l'intérieur, à la partie supérieure du bâtiment, se trouve un orifice lance grenades, dont la sortie se situe à la base extérieure de l'abri. L'armement consiste en une mitrailleuse Maxim lourde qui est sur un demi cercle d'acier scellé dans le béton à hauteur de l'embrasure. Ce dispositif pour information se dénomme affût Chardome du nom de son créateur le colonel Chardome des Chasseurs Ardennais. Ce dispositif permet l'utilisation pratique de la mitrailleuse et un rapide enlèvement de celle-ci. Des grenades mils défensives, complètent l'armement de ce genre d’abris avec en plus l'armement de chacun des occupants. La garnison de ces abris se compose d'un caporal ou un sergent et deux soldats. Inutile d'ajouter que ces abris n’ont pas été occupés pendant la mobilisation. En période normale l'embrasure est fermée par une plaque blindée et la porte fermée au moyen d'un gros cadenas en bronze et une patrouille cycliste de deux hommes passaient trois fois par jour et cela à des heures irrégulières afin de vérifier si tout était normal. Il y a ailleurs, d’autres abris spéciaux, dits de contre irruption dont les dimensions de 8m 50 sur 6m 65 ,épaisseur des murs 1m 30. Ils sont pourvus de deux embrasures et d’une cloche d’observation. L'armement est plus important : un canon anti-char de casemate 47 mm, une mitrailleuse lourde, un fusil mitrailleur des grenades défensives un ventilateur et un phare à acétylène. Certains sont reliés téléphoniquement, d'autres disposent de fusées de couleur différente destinées à solliciter le dégagement par l'appui de l'artillerie de forteresse, la garnison se compose d'un sous–officier, de deux caporaux et 8 soldats. A Visé nous disposons de plusieurs gros abris dits de contre-irruption. Un se situe à la caserne de Visé pour défendre l'accès a la rue de Berneau, le second qui était un abri a étage se trouvait derrière la caserne et défendait la route de Mons. Il y avait en plus deux petits abris de flanquements. Tous ces abris de la frontière de l'Est, sont confiés aux Chasseurs Ardennais, aux cyclistes-Frontière et dans le secteur de défense des forts de Liège au R.F.L. comme poste d'observation, ces derniers joueront un rôle de premier ordre dans le réglage des tirs de leurs forts. Après avoir brièvement décrit les abris, du moins ceux qu'il m'a été permis d'occuper durant mon service militaire, nous en arrivons au 10 Mai 1940. Il faut tout d'abord préciser que depuis le mois de mars 1940, le Régiment Cycliste Frontière, a été dédoublé par l’apport de réservistes venant d'autres régiments. La 51ème compagnie du III bataillon du 2 Rég. Cy. Frontière à laquelle j'appartiens se trouve sous les ordres du Capitaine-Commandant DE RACHE (plus tard Général-Major) Le bataillon occupe la rive gauche de la Meuse sur le territoire des communes de Hermalle S/Argenteau ( Basse-Hermalle ) de Visé (Devant le Pont) et de Lixhe. Le dispositif de défense va de Préixhe à Lixhe. De plus il assure l'alerte le long de la frontière néerlandaise. Outre leur mission d'alerte ces postes ont une mission de destruction routière, ainsi que ferroviaire soit 8 au total, de même qu'un dispositif de déraillement d'un train à Visé-Bas. Le bataillon assure aussi l'occupation d'une position d'abris dont quatre seulement abris de contre-irruption seront défendus jusqu'au 10 Mai 40. POURQUOI ? parce que cette position n'est prévue que pour permettre la destruction des ponts de la Meuse, en retardant l'ennemi. La position défensive dont les lisières extérieures bordent la rive gauche du fleuve s'appuie sur cinq ouvrages bétonnés (abris) protégeant des armes automatiques. Le 10 mai à 1hre 30 la 51ème
compagnie est sur place à DEVANT le PONT. 10hres 30 l'infanterie allemande débouche dans le découvert situé entre le chemin de fer VISE-TONGRES et la courbe Visé Haut, Visé-Bas ; Entre temps, les abris de contre-irruption ont sur ordre été évacués avec l'armement, seul, dans l’un d'eux on n'a pu retirer le canon de casemate, on l'a fait sauter sur place. Apparition de fantassins allemands sur les hauteurs de Berneau au nord du Chemin de fer et dans la tranchée de ce même chemin de fer. Réaction très violente de notre défense. L'ennemi glisse vers le sud et prononce son mouvement devant le front du bataillon. Il ne tente pas de franchir le fleuve, mais prend violemment sous son feu les défenseurs de la rive gauche, mais ceux-ci ayant une plus grande puissance de feu, aidés en cela par le fort de Pontisse le combat durera jusqu'à 15 heures l'ennemi n'insistant plus. 16 heures : Les Allemands franchissent le canal Albert à Vroenhoven. Le commandant du 21ème Rgt Cy Frontière ordonne le rabattement des unités du III bataillon qui sont au nord du chemin de fer. Ces unités (y compris un peloton du 21ème Grenadiers) se place en bretelle sur le talus et face au nord. C'est une position précaire qui donne d'excellentes vues sur les mouvements que pourrait faire l'ennemi mais aussi a des tirs fichants et le risque de mitraillade par avion. L'ennemi cloué au sol par notre tir, ne tentera plus d'action offensive il se bornera à tirailler sur tout le front du quartier sans chercher à franchir le fleuve. Partout nous avons la supériorité du feu. A 22 heures 15 ordre de repli du Bataillon. (nous sommes toujours le 11 mai). La 51ème compagnie constituera l'arrière garde, fera sauter le pont sur le canal Albert à HACCOURT dernier ouvrage entier de la position tenue les 10 et 11 mai par le III Bataillon du 21ème Régiment Cyclistes-Frontière. * * * Quand à la 61ème compagnie du III bataillon, elle occupe la rive gauche de la Meuse depuis la lisière sud de Lixhe et voisine le 21ème Grenadiers, elle tend la main à la 51ème compagnie du IIIème bataillon du 21ème Rgt Cy Frontière. Le 10 mai 1940 à 01hre30 la mise en place de la compagnie est terminée sur
ses emplacements de combat. Les garnisons des gardes de la rive
droite repassent la Meuse. Ils sont hors de portée de nos armes, on ouvre le feu au fur et à mesure qu'ils approchent ; Combat dure toute la journée. Progression de l'ennemi route de
Mouland, café, musette, le Sergent DETAYE y va de son char Mark VI équipé du
canon 47. Le VIème
groupe du 31ème d'artillerie montée fait du beau travail sur la
cabine de signalisation butoirs de Visé-Bas, Abattoirs de Visé-Culée Est du Pont-rail,
en plein dans le mille. Le 21ème
grenadiers bat en retraite. Le peloton du s/Lt. CHATEL reçoit l'ordre du Cdt de
la 61ème Cie. le Lt. PARENT de rester sur place il se conforme à
l'ordre reçu. 18 heures : Tirs d'artillerie
sans discontinuer, Château Mazy et L'église brûle. Voila en bref, l'action du III bataillon du 21ème Rgt. Cy. Frontière sous les ordres du Major L'hoir se composant des 51ème et 61ème Compagnies sous les ordres du Cpt-Cdt DE RACHE et du Lieutenant PARENT. La 51ème Cie restant en arrière garde fera sauter le pont de Haccourt dès que toutes les compagnies seront repassées soit la 31ème, la 41ème, la 61ème compagnies du IIIème et 31ème Bataillon seul un peloton de la 61ème ne se présentera pas et sera capturé le lendemain. * * * IIème BATAILLON - 21ème
REG CY FRONTIERE Le IIème Bataillon est issu de la 21ème Compagnie de VISE dédoublée le 15 Mars 40. Il occupe la rive gauche de la Meuse sur le territoire de la Commune de HERMALLE sous ARGENTEAU depuis CHERTAL jusque, PREIXHE de plus, il assure l'alerte le long de la Frontière néerlandaise. Le Bataillon est constitué par les 31ème et 41ème Cie, respectivement sous les ordres du Commandant HOUBIERS et du Lt. BECKMAM. La 41ème compagnie occupe
les postes d’alerte et de destruction ,n°5 et 6 à WARSAGE, le poste 7 à FOURON
le COMTE et le poste 8 à ULVEND. Le bataillon assure en outre l'occupation d'une position d'abris qui entoure ARGENTEAU et RICHELLE face à l'est et qui comprend 10 ouvrages seulement les deux abris de contre-irruptions seront défendus jusqu’au 10 Mai 40. L'occupation de ces abris n'était d'ailleurs prévue que pour permettre en cas d'attaque brusquée la mise en place des troupes et la destruction des ouvrages sur la MEUSE. Enfin un détachement fort d'un groupe de combat et de quelques D.B.T.(Lance grenade) est placé a DALHEM ou il tient une position de recul pour le IIème Régiment Cy Frontière. Le 10 Mai 0
heure – Le Bataillon est alerté, la mise en place terminée à 2hres 40 11 Mai 40 2hres - une patrouille ennemie en éclaireur ,Cavaliers et
motorisés sont signalés aux débouchés de RICHELLE, mais ils sont refoulés. 12 Mai 40 1hre - Le bataillon franchit le pont de HACCOURT et la 51ème Cie le fait sauter. Oui, les Cyclistes-Frontière ont bien mérité la reconnaissance de la ville de Visé. Ils ont fait de leur mieux pour la défense de son patrimoine seule l'amplitude des moyens de l'ennemi a eu raison de leur volonté. Chantraine S.
[1] Tiré d’un « VIGILO » Amicale Nationale des Cyclistes-Frontière fondée en 1977. Sans doute un tirage spécial car il n’y a ni date ni numéro de série ! |