Maison du Souvenir

Le ravitaillement en Belgique pendant la deuxième guerre.

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LE RAVITAILLEMENT EN BELGIQUE

PENDANT LA DEUXIÈME GUERRE

PREMIER PARAGRAPHE

       Les vraies restrictions entrèrent en vigueur le 25 Mai 1940.

       Vingt six ans plus tôt, les Allemands avaient déjà envahi notre pays et volé (réquisitionné) tout ce qu’ils pouvaient, en commençant par le ravitaillement alimentaire.

       Le statisticien allemand Ernst Engel a proposé un système de coefficients familiaux permettant d’établir les rapports entre les besoins des divers membres d’une famille. Il a suggéré le terme de « Quet » pour désigner ces coefficients, en souvenir du statisticien belge Quetelet. Dans ce système, on admet que l’accroissement de la consommation de nourriture correspond étroitement à l’augmentation de la taille et du poids de l’individu. Des chiffres relatifs à la taille et au poids moyen de personnes de sexes et d’âges différents ont été calculés, le produit de la taille et du poids a servi de base à l’échelle. L’unité de ce système de « Quet » se rapporte au nouveau-né. Les coefficients augmentent donc avec la croissance, c’est-à-dire l’âge. Ces coefficients suivent une progression arithmétique, par fractions de 0,1 par année d’âge au dessus de l’unité entière qui constitue le point de départ (nouveau-né). Cette progression s’élève jusqu’à 25 ans pour l’homme adulte et 20 ans pour la femme adulte. Dans ces conditions, l’homme adulte est représenté par 3,5 unités et la femme adulte par 3 unités. D’après cette méthode, la grandeur d’une famille composée du père, de la mère et de trois enfants de 16, 13, et 7 ans serait égale à : 3,5 + 3 + 2,6 + 2,3 + 1,7 = 13,1 « Quets ». Ce chiffre donne droit à un certain nombre de timbres, ces chiffres sont différents pour chaque famille selon la composition du ménage.

       Ce système de coefficients familiaux a été du même type que pendant la première guerre.

       Les adultes qui avaient le souvenir de l’autre guerre faisaient la comparaison entre la situation en 1914-1918 et celle de 1940 : plus de comité national, plus de pays neutres pour nous venir en aide et nous « protéger ». L’inquiétude était grande. « On dépend du bon vouloir du pouvoir occupant ». Après quelques semaines d’attente assez confiante (pour ce qui est de l’alimentation) parce que « l’Allemand se montrait gentil » on déchanta.

       Le rationnement officiel s’organise difficilement. Pour diminuer la dépendance de l’étranger en céréales panifiables[1], la ration de pain de la population non agricole est, dès le début de l’occupation (6 juin 1940), fixée à 250 grammes de pain par jour. Le taux de blutage[2] est porté, en juin 1942, de 85% à 97%. (Les déchets passent de 15% à 3%). On incorpore aussi de la fécule de pomme de terre dans la farine.

       Avant la guerre, les importations de céréales panifiables s’élevaient en moyenne à 1.200.000 de tonnes par an. 80% de blés étrangers employés en meunerie provenaient d’outre-mer et presque uniquement d’Argentine, des Etats-Unis et du Canada.

IMPORTATIONS DE DENRÉE PANIFIABLES



       Ces 849.910 tonnes livrées par l’étranger aux meuneries, furent complétées par 1.468.000 tonnes (environ) de provenance belge.

       Il s’agit des quantités destinées, en ordre principal, à la population non agricole. (Mais dont une partie fut prélevée pour les besoins de l’armée d’occupation).

D’une part, l’augmentation des superficies emblavées[3], d’autre part des facteurs techniques permirent d’augmenter la production. Les superficies emblavées en toutes céréales panifiables sont passées de 270.000 hectares en 1940 à 375.000 hectares en 1943.

       Des négociations furent entamées avec les pays producteurs de céréales en vue des échanges directs entre ces pays et le nôtre. Des accords prévoyant l’échange de produits industriels belges d’une part, contre des céréales et d’autres produits alimentaires étrangers d’autre part, furent conclus, grâce à la participation des délégués belges, notamment avec l’U.R.S.S., la Roumanie, la Hongrie et la France.

       Avant que l’Allemagne ne déclare la guerre à l’U.R.S.S. le 22 juin 1941

QUANTITÉS CONSOMMÉES, EN 30 JOURS, PAR UN OUVRIER

BELGE « MOYEN » EN 1929



       Le Moniteur Belge annonce chaque mois ce que sera, en principe, le rationnement des denrées alimentaires.

       Du 7 mai au 5 juin 1941, le rationnement des denrées alimentaires était fait suivant le tableau ci-dessous (Moniteur Belge, n° 124, 4 mai 1941).



       A l’effet de suppléer à l’insuffisance des distributions de pommes de terre, les détenteurs de cartes de pommes de terre ont pu obtenir pendant cette période 50 grammes de pain ou 37 ½ grammes de farine (ou 25 grammes de pâtes alimentaires) en échange de chacun des 30 timbres divisionnaires de pommes de terre non utilisés.



       Presque tous les ménages ont fait usage de cette licence. Ils n’ont donc pu se procurer, au maximum, que 7 ½ kgs de pommes de terre.

Les enfants de moins de 14 ans ont droit à 15 timbres n° 11 tous les mois, chaque timbre correspondant à ½ litre de lait entier. La ration journalière est donc de 0,225 litre.

       Les malades peuvent, sur production d’un certificat médical, échanger chaque timbre n°4 (Beurre) contre trois timbres n°11(Lait)[4].

       Le Moniteur des 4-11-1940, 27-3-1941 et 5-5-1941 précise que des rations supplémentaires seront octroyées à certaines catégories d’ouvriers faisant un travail lourd (notamment les mineurs et les métallurgistes). Le timbre n° 1 (pain) et le timbre n° 10 (viande) : double ration, y compris le dimanche, en cas de travail régulier.

       Timbre n° 3 (margarine): 2 timbres pour 3 journées de travail effectif (mineur de fond) : 2 timbres pour 3 journées de travail effectif (autres catégories d’ouvriers faisant un travail lourd).



       Jusqu’en juin 1941, aucun ménage n’a pu obtenir, pour tous les produits, les quantités prévues par le rationnement officiel. Beaucoup de timbres distribués, souvent 50% parfois 100%, n’étaient pas honorés. C’était le cas notamment pour la margarine et le beurre, et surtout pour la viande et les pommes de terre.

       La situation des ouvriers des grandes entreprises était parfois un peu meilleure, à cause de certaines initiatives des directeurs.

       Cependant, si la ration de pain reste fixée à 225 grammes, la qualité des farines diminue sensiblement. La population cherche à savoir ce qu’on lui fait manger. Elle parle de farine de féveroles[5], de haricots, de pois et de fécule de pommes de terre. Ceux qui ont le langage le plus rude se plaignent du pain qui se transforme en gaz.

       Les femmes qui achètent la farine et la blutent pour obtenir « un pain mangeable » sont frappées par l’aspect bizarre du résidu qu’elles trouvent dans le tamis à la fin de l’opération.

       Au début de l’été, la situation empire. Toutes les classes de la société constatent avec amertume que ce n’est même plus une boule de son (blutage à 97% au lieu de 85%) qu’on se met sous la dent, mais une pâte dans laquelle le froment et le seigle ne trouvent pas beaucoup de place. La composition du pain reste un mystère.

       Ceux qui se disent bien informés parlent d’incorporation d’orge, de betteraves, de carottes et d’épluchures de pommes de terre. L’augmentation du taux de blutage permet d’augmenter la quantité d’eau incorporée à la farine. On a toujours 225 gr de pain, mais de quelle qualité…

       «On nous prend pour des cochons » - «on crèvera de faim » - « il faut un estomac de fer » : telles sont les tristes réflexions…

       Une mission administrative et économique partie de Bruxelles, au début de 1942, dut, au cours d’entretiens à Berlin, défendre nos 225 gr de pain.

       On peut espérer que l’histoire nous apprendra un jour quels furent les objets et les résultats de ces entretiens.

       On peut aussi se demander ce qu’aurait été, en cas de diminution de notre rationnement, la réaction de nos ouvriers qui, déjà en 1941, malgré les menaces de l’occupant, s’étaient mis en grève pour obtenir une amélioration de leur alimentation.



       Les consommateurs, qui sont les meilleurs juges, constatent unanimement, à la fin de 1942 et au début de 1943, que la situation est meilleure qu’en 1941.

       Si l’alimentation s’est améliorée, elle reste cependant toujours d’une insuffisance notoire par rapport à l’avant-guerre et aux exigences physiologiques.

       La quantité de pain est nettement insuffisante (la qualité aussi laisse à désirer) ; la carence des corps gras s’est aggravée ; le morceau de viande, même servi seulement deux fois par semaine, est fort petit ; il y a trop peu de lait (quantité nulle ou tout à fait négligeable dans beaucoup de ménages).

Lait écrémé :

       Les restrictions firent mieux apprécier la valeur nutritive du lait.




       Le lait entier étant rationné (et réservé aux enfants de moins de quatorze ans et aux malades qui échangent leurs timbres de beurre), un grand nombre de familles n’ont pu, en 1941, que se procurer du lait écrémé qui, s’il n’était soumis jusqu’en 1942 à aucun rationnement, était cependant, dans certaines communes, ou difficile à trouver ou livré seulement par petites quantités.

Fromage maigre :

       En 1941, on ne trouvait que du fromage blanc (ou certains fromages maigres qui n’étaient que des fromages blancs plus ou moins salés et séchés).

       Un certain nombre d’ouvriers ont pu se procurer, chez leur employeur, une marchandise qui n’existait guère dans le commerce : du fromage cuit.

Œufs :

       Le commerce des œufs restera longtemps libre. Mais les œufs disparurent complètement du marché libre.

       Quand la vente fut réglementée, les œufs furent réservés aux enfants de moins de 4 ans.

Poisson :

En 1941 et pendant les trois premiers trimestres  de 1942, peu de ménages purent se procurer du poisson frais. Il était très rare et fort cher (30 à 45 Fr. le kg.).

       Seul le poisson salé apparaissait de temps en temps et comme un aliment précieux sur la table des ouvriers.



       Pendant le dernier trimestre de 1942 et surtout pendant le premier trimestre de 1943, il y eut d’abondantes ventes de poisson (vente réglementée), principalement de harengs frais et salés[6].

       L’abondance de pommes de terre et de poissons caractérise cette période. Ce fut vraiment le salut de la population.



Farine de châtaignes :

       Elle fut toujours une consommation fort limitée, et saisonnière.

Légumes :

       Il y eut pour les ménagères un problème avec le rationnement des légumes. Ils n’apparurent parfois sur le marché et dans les magasins que par à coups. Certains jours, ils disparaissaient à peu près complètement (sauf au marché noir).

       Quelques entreprises, pour parer dans une certaine mesure à cette pénurie ou à cette carence, ont organisé des économats où le personnel a pu se procurer des légumes à bon marché. Grâce à une meilleure culture du jardin, grâce surtout à l’apport des « coins de terre » beaucoup de ménages ont consommé, en1943, plus de légumes qu’en 1941 et 1942 ; d’autres n’ont pas augmenté leur consommation mais ont dépensé moins pour les légumes.

       On consomma beaucoup moins de rutabagas (choux navets), de topinambours, que pendant la guerre de 1914 à 1918.

Fruits :

       Ils furent en général rares et d’un prix élevé, sauve à la campagne.

       Les enfants reçurent de temps en temps à l’école une orange, des figues.

        Il y eut, fin 1942 et en 1943 quelques ventes réglementées de pommes, de poires (quantités rationnées).

Terre cultivable en ville :

       On assiste à un véritable « rush » vers la moindre parcelle de terre cultivable. Beaucoup d’entreprises ont favorisé ce mouvement en permettant à leur personnel de cultiver les propriétés de la société ou des terrains pris en location par l’entreprise. Dans les parcs et les jardins, on retourne les parterres et les pelouses.

       Malheureusement, le rendement n’a pas toujours répondu à l’effort. On manque d’engrais (chimique)[7], de bonnes semences et de bons plants de pomme de terre.

       Bien des ménages qui élevaient quelques poules ont dû les « mettre à la casserole » parce que les graines ne pouvaient être achetées que fort cher au marché noir. Par contre, un nombre toujours croissant de familles ont élevé des lapins.

Le marché noir :

       Il y a depuis le début de la guerre, à côté du marché officiel et du marché libre, un marché noir tant pour les denrées rationnées que pour les produits non rationnés.

       La faim tenaillait les familles. Celles qui avaient des économies, celles qui avaient un excédent de revenus ou qui touchaient un « extra » cherchèrent à améliorer leur régime alimentaire en achetant « tout ce qu’on peut trouver », c’est-à-dire un peu de farine ou de son, de beurre, de viande ou de pommes de terre.

       Mais pour les familles à revenus modestes, l’obstacle vient d’ailleurs : le prix des marchandises proposées.

       S’il est faux de dire que le marché noir n’a profité qu’aux « bourgeois », il n’en est pas moins vrai que les familles à revenus élevés s’y sont parfois approvisionnées largement, tandis que les familles à revenus modestes (le cas pour la grosse majorité des travailleurs) n’y ont jamais acheté que de faibles quantités.

       Il faut retenir cependant qu’au marché noir, on trouve à côté des trafiquants et des commerçants de tout acabit, des femmes et des hommes qui à l’occasion vendent l’une ou l’autre chose, afin de « gagner un petit quelque chose ».Beaucoup de mineurs vendent une partie de leur charbon, notamment les suppléments reçus pour avoir travaillé le dimanche.



(1) Prix au marché noir influencés par le grand nombre de prix relevés dans des régions industrielles.

(2) Bien que variant légèrement, est supposé constant, afin de faciliter les comparaisons.

(3) Pain de ravitaillement : prix officiel.

(4) Prix moyens plus élevés dans les villes que dans les régions industrielles (10 à 15%)



       La majorité des individus ne mangent pas à leur faim. Ils apprécient les suppléments distribués par les entreprises, les écoles, le Secours d’Hiver.

       Au fur et à mesure que la guerre s’est prolongée, des familles se sont mieux adaptées aux circonstances pénibles : glanage, approvisionnements à la campagne ; elles ont de mieux en mieux profité de certains organismes : Secours d’Hiver, Restaurants Léopold III, collations aux enfants, cantines diverses.

       Certaines familles des régions industrielles reçoivent (ou achètent) des timbres de parents habitant la campagne.

       Les enfants fréquentant les écoles reçoivent, par les soins du Secours d’Hiver, de la soupe (contre remise de timbres et souvent contre paiement) et parfois des collations ou suppléments divers. Beaucoup sont envoyés en colonie où ils bénéficient de rations supplémentaires.

Les dépenses :

       A l’époque, d’après les statistiques d’un médecin portant sur 190 ménages, le revenu mensuel d’une famille moyenne en 1942-1943 s’élève à 1.798 francs. Cela me parait élevé comme salaire. Les dépenses d’une famille moyenne atteignent 1.620 francs.

       Dépenses d’une famille ouvrière moyenne en 1929 et en 1941-1943.



       La marge de 10% entre les revenus et les dépenses représente une économie en vue d’une dépense exceptionnelle.

       En dehors de l’alimentation, les dépenses incompressibles : loyer, eau, gaz, électricité, mutuelle, qui représentent en moyenne 240 francs

PRIX AVANT MAI 1940 ET EN OCTOBRE-DECEMBRE 1942.



       Ce qui complique la tâche de la ménagère, c’est la nécessité, faute de pain, de devoir « cuisiner » plus et dans des conditions parfois fort pénibles : les corps gras manquent, les légumes sont rares, on n’a pas de quoi cuire convenablement les repas parce qu’on manque de charbon et que le gaz n’a pas suffisamment de pression. La préparation des repas est pour un grand nombre de femmes un vrai cauchemar. Beaucoup de femmes se grandissent par les sacrifices qu’elles consentent pour les leurs. Sans compter les heures où elles patientent dans des files d’attente devant les magasins et parfois pour rien, car le marchand (bien en chair) affiche une pancarte à sa devanture avec l’inscription : plus de pommes de terre, plus de pain ou plus de viande.

L’habitation :

       Chez les ouvriers, les familles sacrifient la meilleure pièce qui sert de salon ou de salle à manger. Dans cette « belle pièce », on ne s’y tient jamais, sauf pour écouter la radio (avant la guerre)[8]. Les familles se tiennent toujours dans la cuisine[9] qui sert aussi de buanderie et de salle de bain. Pas une maison n’a de pièce réservée aux soins de toilette. C’est presque toujours dans la cuisine qu’on se lave sommairement tous les jours et « à fond » le samedi ou le dimanche. Les familles ne prennent pas de douche[10].et cependant, en général, les gens sont propres. L’hygiène a fait des progrès.

       Il est probable que les mineurs et les métallurgistes sont les ouvriers les plus propres : les grandes entreprises avaient depuis longtemps installé des douches communes pour leurs travailleurs.

       Les femmes entretiennent à grand peine la maison, par manque de brosses[11], de torchons (en coton) et de savon. Les prix ont changé.

       Une brosse coûtait en 1939-1940 : 1,5 à 5 Fr. ; 1942 : 60 à 150 Fr.

       Un torchon coûtait en 1939 – 1940 : 1,75 à 5 Fr. ; 1942 : avec timbres 12 à 35 Fr., sans timbre : 50 à 80 Fr.

       On ne fait plus le grand nettoyage de « Pâques ». On récure sans savon, on ramasse l’eau avec de mauvais torchons (souvent des sacs).

       Avant la guerre, on faisait régulièrement la toilette de la maison : blanchir, peindre, retapisser. Actuellement, c’est quasi impossible.

Les vêtements, le linge, les chaussures :

       Avant mai 40, les familles ouvrières avaient généralement une garde-robe relativement bien garnie. Il était d’usage d’avoir deux toilettes : l’une pour le dimanche, l’autre pour la semaine (presque toujours l’ancien costume de dimanche « usagé »). Dans certaines armoires, il y avait en outre un « habit » pour les grandes circonstances. C’étaient d’habitude un costume, une robe, un paletot, ou un manteau noir qu’on sortait les jours de kermesse, à l’occasion d’un baptême, d’une communion, d’un mariage ou d’un enterrement. Ce jour-là « on sentait un peu la naphtaline ».



       Bien des ménages avaient aussi dans l’armoire un peu de toile, de coton, et de flanelle pour les raccommodages ou pour confectionner l’une ou l’autre pièce.

       Pour un mètre de tissu, selon la largeur et la composition, il fallait 7 à 17 points.

       Il y avait un certain nombre d’essuies de toilette et de cuisine ainsi que des mouchoirs.

       Dans de nombreuses familles, le linge, les draps de lit, les couvertures et les literies en général se transmettaient de génération en génération. C’était parfois le seul héritage. Avant ou immédiatement après mai 40, les familles qui avaient suffisamment d’économies firent quelques achats de linge et de tissus.

       Il a été distribué, de mai 1940 à août 1943, deux cartes d’habillement par individu. Sur la première carte il y avait 80 points, sur la seconde 120 points. Pour se faire une idée de l’insuffisance de ce nombre de points, il faut savoir que pour une chemise d’homme, il faut de 20 à 24 points, pour un veston et un pantalon de travail en coutil[12] : 56 points, pour une chemise de nuit : 30 points, pour une robe de femme : 30 à 42 points, pour une veste en tricot : 33 points, pour une chemise : 12 à 20 points, une combinaison : 17 à 21 points, un pyjama : 30 points, des bas (chaussettes) : 4 points.



       Avec les mêmes points, il faut acheter le linge de table et les draps de lit : une nappe 22 points, une lavette 3 points, un essuie-mains 5 points, un drap de lit 35 à 44 points.

       Pour les chaussures, les enfants ont en principe droit à un bon par an ; les adultes, sauf certaines catégories d’ouvriers, n’ont généralement reçu qu’un seul bon depuis la guerre, mais n’ont pas toujours, pu utiliser leur bon faute de marchandises; beaucoup n’ont pas obtenu de bon.

       Comme pour les tissus, il s’agit souvent de bottines en « ersatz »[13] (tissu  semelles en bois ou en caoutchouc etc.) ou en cuir de mauvaise qualité.

       Les prix au marché noir (achat sans « points » ou achat avec « points » payés) sont devenus de plus en plus prohibitifs.

       Les cordonniers fabriquaient des sandales dont les semelles étaient taillées dans de vieux pneus, et dont les lanières étaient fabriquées avec du cuir de récupération (vieux cartables, guêtres etc.). Les ouvriers travaillaient chaussés de galoches[14]

Prix des vêtements, du linge et des chaussures,

 plus le nombre de points pour les acquérir.



       Avant d’acheter une pièce, on fait un petit calcul : son prix représente autant de kilogrammes de froment, de pain, de gruau d’avoine, etc.

       Après plusieurs années de guerre, la situation est devenue pénible pour beaucoup de familles.

       Les garde-robes et les armoires à linge se sont vidées. Beaucoup de vêtements sont usés jusqu’à la trame. Le linge est devenu trop mince. Les rapiéçages se sont multipliés. Bien des tissus ressemblent à une passoire. Les bas sont ravaudés à outrance.

       L’entretien du linge comprend aussi la lessive. Ici, la difficulté provient du manque de bons produits et notamment de savon. La plupart des produits autres que le mauvais savon du ravitaillement sont mordants (même les poudres fournies par le ravitaillement régulier). Pourtant des solutions existent[15].



       Le savon dit « fin » est de mauvaise qualité. C’est longtemps un petit savon vert, très léger, appelé « flotteur » parce que, comme un bouchon, il flotte sur l’eau. Puis c’est un savon très dur et lourd à base d’argile (kaolin) et dans la composition duquel il n’entre pas de corps gras. Ces deux savons fondent très vite et le second mousse très peu.

       Les jeunes de plus de 18 ans et les adultes de sexe masculin ont droit à un savon à barbe pour quatre mois.

       Les poudres à lessiver sont de mauvaise qualité, les poudres de soude Henco, Imi et Tessen, ne valent pas le sel de soude d’avant-guerre.

       Le manque de charbon complique encore la lessive parce que nos ménagères ont l’habitude de faire bouillir le linge. D’autre part, afin d’éviter l’usure, on lave le linge et les draps de lit moins souvent, ils sont donc plus sales.

       Les femmes qui avaient l’orgueil de leur belle lessive, qui admiraient leur linge bien blanc lorsqu’il séchait à la cour ou dans le jardin, sont peinées de ne plus jamais avoir du linge tout à fait propre, du linge « sans fond sale ».

Rationnement ordinaire : octobre-décembre 1942.



Rationnement pour certaines catégories d’ouvriers.



Articles de lessive : septembre- novembre 1942



       L’éclairage et le chauffage figurent au budget mensuel avec 84,24 franc, soit 5,2% des dépenses, au lieu de 4,9% avant la guerre.

       Le charbon et le gaz coûtent plus cher  qu’avant mai 1940. Le charbon est rationné. Pendant le rude hiver 1941-1942, beaucoup de familles ont eu froid. La situation fut un peu meilleure pendant l’hiver 1942-1943 parce que la température fut particulièrement douce.

Rationnement trimestriel ordinaire :

novembre-décembre 1942-janvier 1943 (1)



Schlamm[16]

(1) Quelques grandes entreprises métallurgiques ont distribué à leur personnel des rations importantes de coke.

Rationnement mensuel pour les mineurs novembre 1942.



(1) Souvent ils payent un « surplus » pour une meilleure qualité.

       En novembre, pour deux dimanches de travail 200 kg de charbon en plus. A remarquer que ce supplément de charbon est presque toujours vendu au marché noir.

Succédané :

       On fabriquait aussi des briquettes avec du poussier de charbon (Schlamm). Elles étaient composées de 2/3 de poussier et de 1/3 d’argile. On pétrissait ce mélange avec de l’eau pour fabriquer de petites briquettes à l’aide d’un moule en bois. On laissait ensuite sécher. Ce charbon de fortune chauffait assez bien, surtout si on le mélangeait avec du charbon normal.



Autre méthode

       Avec des vieux journaux, du vieux carton, etc. qu’on avait préalablement fait tremper dans de l’eau durant 24 heures afin qu’il se désagrège, on pétrissait une pâte, à laquelle on pouvait ajouter, lorsqu’on en avait, un peu de colle à tapisserie ; on constituait ensuite des boulettes qu’on pressait avec un petit appareil nommé « presse-boulets. On laissait sécher et ce combustible de remplacement était stocké pour l’hiver. Mélangé à du charbon, il chauffait bien.

 

Livre : privations et espoirs

La société Belge sous l’occupation allemande 1940-1945

 Auteur : Guillaume Jacquemyns

Edition : Office de publicité



DEUXIEME PARAGRAPHE

       A la fin du 19e siècle, la Belgique est passée d’un pays presque autonome en produits de base (fruits, légumes, viandes et céréales) à une économie qui échange, sur les marchés internationaux, une partie de sa production industrielle contre des biens de première nécessité, notamment le blé, utilisé à la fois pour l’alimentation humaine mais aussi comme fourrage pour le bétail produit massivement en Belgique. Nombreux sont ceux qui désertent les campagnes pour chercher du travail dans l’industrie lourde et les charbonnages, pour un salaire plus élevé.

       Toujours au 19e siècle, des terres immenses et fertiles en Amérique du Nord et en Russie sont mises en culture. Les transports des céréales par trains ou par bateaux permettent à ces pays d’exporter leurs récoltes céréalières dans toute l’Europe. Ceci a pour effet de faire chuter les prix. Les agriculteurs se tournent vers l’élevage ; si les prix des céréales chutent, ceux du bétail augmentent.

Pendant la première guerre, l’occupation par l’armée allemande donne lieu à une crise alimentaire très grave, provoquée par l’embargo allié et surtout les réquisitions allemandes.

       Après la guerre de 1914 - 1918, les importations reprennent rapidement. Les céréales de tout genre sont, malgré le transport en bateau depuis l’Amérique du nord, toujours moins cher que la production du pays.



       Jusqu'à la fin de la deuxième guerre, dans les campagnes, les machines mécaniques et la traction motorisée restent rares. Les techniques traditionnelles, la traction animale, les bœufs ou les chevaux reste principalement utilisées.

       Au début de la seconde Guerre mondiale, la Belgique dépend toujours des importations pour subvenir à ses besoins. Le secteur agricole produit seulement les trois quarts de la consommation du pays et la mémoire de la crise alimentaire de 1914-1918 est encore fraîche dans les esprits.

       En 1939, les autorités belges ont anticipé l’approvisionnement de la population en temps de guerre. En mai, le Ministère des Affaires Economiques a créé un département ministériel pour le ravitaillement, l’aide civile et le Secours d’Hiver.



       Le gouvernement impose l’augmentation des cultures (Emblaver) de froment, de betteraves, et de pommes de terre, afin d’accroître la capacité nutritionnelle de l’agriculture belge.

       Pour une année, on peut considérer qu’il fallait à l’époque à peu près 1 hectare par vache si elle n’est nourrie que d’herbe ou de foin, 1,45 hectare pour une vache allaitante. Il faut tenir compte du fait qu’on se situe en 1940 - 1945 avec des performances (lait et viande)  bien inférieures à celles que nous connaissons aujourd’hui : un hectare voué à la culture de froment peu nourrir huit personnes, quatorze s’il s’agit de pommes de terre, et dix-huit si ce sont des betteraves.

       Les fermiers fauchaient des fougères pour s’en servir de litière pour les vaches et économiser la paille.

Les années 1937 à 1940

       La montée du fascisme en Italie et en Allemagne, la guerre d’Espagne et l’invasion de la Pologne. Poussent les ménagères et les petits commerçants à constituer des réserves. Certains produits disparaissent alors des étals. On connaît une inflation record : en un mois, le prix des œufs augmente de 7%, celui des haricots, de 13%, la margarine de 12%. Le savon et les allumettes sont pratiquement introuvables.

       Le 10 mai 1940  Le gouvernement Pierlot instaure le rationnement. Les réserves du Département pour le Ravitaillement s’élèvent à 330.000 tonnes, auxquelles s’ajoutent 250.000 tonnes de grains conservées dans les cales de bateaux à Anvers, les « stocks flottants ».

       L’entrée en guerre provoque le départ des navires chargés de céréales. Les administrations quittent la Belgique pour Bordeaux avec tous leurs dossiers. Déjà privées de certains nombres d’employés rappelés sous les drapeaux ou réfugiés en France, elles ne laissent au pays que peu de personnel pour le service à la population.

       Le 28 mai 1940 : après des combats violents et 18 jours de campagne, la Belgique capitule. Les réserves de provisions qui restaient avant l’arrivée de l’occupant, furent en majeure partie réquisitionnées par les troupes allemandes.

Zone interdite : la mainmise allemande.

       Les départements du Nord de la France et du Pas-de-Calais sont rattachés au gouvernement militaire de Bruxelles. Tous se voient bientôt gratifiés d’un statut spécial les rattachant directement au Militärbefehlshaber in Belgien. Ils connaissent un régime plus sévère que le reste de la zone occupée. Le décret, allemands du 7 juillet 1940 fixent une « ligne d’arrêt des réfugiés  qui empêche le retour d’une grande partie des personnes parties en exode.

Délivrance des timbres

       Le département ministériel pour le ravitaillement distribue préventivement les cartes de rationnement aux communes. Au début de l’année 1940, celles-ci disposent d’une provision de timbres pour quatre mois.

       Il est rappelé qu’au terme de l’article 15, paragraphe 3 de l’arrêté du 1er Mars 1940, les timbres de rationnement ne peuvent être délivrés que sur présentation de la carte d’identité.



       En cas d’empêchement, il suffit de produire une attestation signée par les intéressés renseignant les noms et adresses de ceux-ci, le N° de leur carte d’identité ainsi que nom et le N° de la carte d’identité de la personne mandatée pour le retrait des timbres.

       La distribution des cartes de rationnement et la délivrance des timbres se faisaient par ordre alphabétique. Le premier jour ouvrable de la semaine, seuls les chefs de famille dont le nom de famille commençait par les lettres A.B.C., pouvaient se présenter au bureau, les jours suivants c’étaient les lettres D.E.F., puis G.H.I.J.K., ensuite L.M.N., pour finir par les lettres qui vont de O à Z. Cela permettait de ne pas engorger les bureaux et les couloirs des établissements, de ne pas faire patienter trop longtemps les chefs de famille ou les porteurs d’une attestation.




       Les bureaux étaient répartis dans les locaux des maisons communales ou dans des écoles.



Distribution des cartes de rationnement et des timbres dans une école.

       Les retardataires et les personnes bénéficiant de timbres supplémentaires pourront se présenter à une date ultérieure.

       Les réfugiés rentrent en Belgique. N’ayant pas reçu de cartes de rationnement, au début du mois, ils reçoivent des feuilles de ravitaillement.

Cartes de ravitaillement provisoire



       Elles étaient munies du sceau communal et numérotées, (lorsqu’elles étaient distribuées à des personnes rentrant d’évacuation après le début du mois, les jours non utilisables étaient annulés). Ces feuilles durent rapidement être remplacées à cause de fraudes multiples et parce qu’elles n’étaient numérotées que de 1 à 30 (et créaient des difficultés les mois de 31 jours).

       Si les timbres donnent (droit) aux rationnements, il faut encore avoir l’argent pour payer les marchandises.

       Le 7 juin 1940 : Le premier tableau de rationnement de l’occupation est publié au Moniteur belge. Le Collège des Bourgmestres et Echevins faisait imprimer ces tableaux en grandes dimensions et de couleur très vive. Chaque nouvelle publication a une couleur différente pour attirer l’attention de la population. D’autres informations y étaient imprimées : les dates de remise des timbres pour les pommes de terre, le beurre (ou margarine), la viande, le charbon en période hivernale, les nouveaux arrêtés des lois et informations pratiques pour les ménagères. Ces affiches étaient collées à la maison communale, devant les écoles, les lieux de passage et les colonnes Morris en ville et paraissaient dans les journaux. Les ménagères devaient se tenir au courant des dernières informations pour ne pas manquer une distribution de denrées alimentaires.

       Les mères de famille qui attendaient des heures devant les boutiques, à partir de 5 ou 6 heures du matin, par les froides journées d’hiver, tandis que les enfants restaient seuls à la maison dans les lits glacés par suite du manque de charbon. Et pourtant, il fallait bien tenter de leur rapporter quelque chose à manger et de quoi garnir la mallette du père pour aller travailler, ou le colis d’un père prisonnier dans un lointain stalag, ou un camp de déportation. Il fallait, sinon vivre, du moins tenter de survivre.

       Les difficultés du ravitaillement restent une préoccupation première du temps de guerre, elles sont symbolisées par les files d’attente devant les magasins, phénomène indissociable de la pénurie.

       Parfois, quelques personnes s’étonnent de voir des paquets déjà prêts aboutir prestement dans le sac d’une privilégiée. Les jalousies s’attisent entres ceux qui mangent à leur faim et les autres.



File d’attente devant un magasin, contrôlée par un gendarme.

 

Changement de détaillant :



       Les chefs de famille doivent s’inscrire chez un détaillant pour recevoir leur ration. Les changements de détaillant ne sont pas admis sauf cas de force majeure, (déménagement, nouveaux ménages, cessation d’affaires de la part du négociant détaillant). Les personnes qui ne sont pas inscrites chez un détaillant (épicerie, beurre, pommes de terre) devront se présenter au bureau du ravitaillement. Les détaillants reçoivent des bordereaux fournis par le ministère des affaires économiques, sur lesquels ils doivent coller les timbres de rationnement qu’ils ont reçus des clients. Quand les bordereaux sont remplis des deux côtés, les commerçants les renvoient au ministère, où ils sont contrôlés puis altérés pour qu’on ne puisse pas s’en resservir. (Voir plus bas).




Moulins à bluter la farine



Le pain :

       25 mai 1940. La ration journalière de pain passe de 450 grammes à 225 gr de froment bluté à 85% au début puis à 97%. (15% de déchets puis passe à 3% de déchets) ou 300 grammes de farine par jour. On obtient un pain 1 kilo sous présentation d’un timbre numéro 1 plus la somme de 2,60 Fr ou de 30 Fr au marché noir.



       Le pain ne peut être consommé frais, sa vente ne pouvant commencer que 24 heures après la sortie du four. Grâce à cette mesure qui met en circulation uniquement du pain rassis, on espère réduire la consommation familiale.



       L’intervention du Secours d’Hiver en faveur du public, offre aux femmes enceintes ou allaitant qui sont porteuses de la carte du S.H. (Secours d’Hiver) : 4 timbres par mois. Pour cela elles doivent présenter un certificat médical.

       Passavant[17] de mouture de céréales panifiables ou de concassage d’avoine

        La population se plaignait, à juste titre, de la mauvaise qualité du pain. Il ne levait pas, il collait au couteau, prenait vite le goût de moisi, ce qui n’était pas toujours la faute de la farine livrée par le ravitaillement, mais souvent un peu celle du boulanger qui incorporait à cette farine déjà difficile à travailler une quantité d’eau, bien au-dessus de celle autorisée. De plus, les boulangers n’utilisaient plus de la farine pour mettre sur leurs tables afin d’empêcher la pâte de coller, mais de la sciure de bois. Le pain n’avait plus le goût de pain complet, mais parfois de sciure de pin ou de sapin.



Timbres altérés pour qu’on ne puisse s’en servir

       En 1945, les Français eurent droit à ce fameux pain de maïs qui donna la « gale du pain » à une partie de la population. Si les Français ont eu pendant des mois ce pain de maïs, particulièrement indigeste parce qu’il ne levait pas, c’est tout bêtement parce que le ministre du ravitaillement français, parti aux U.S.A. pour acheter du blé sans s’entourer d’experts, sous le prétexte qu’il parlait parfaitement l’anglais, acheta un produit nommé « Corn » qui, s’il veut dire « Blé » en Angleterre, se traduit par « Maïs » en américain !

       Les Belges, les Hollandais, les Russes, mieux conseillés achetèrent du blé aux U.S.A. et reçurent véritablement du blé, parce qu’ils avaient prononcé le mot « Wear » qui correspond au mot « blé » en Amérique.

Les pommes de terre :

       Les cultivateurs devaient signaler la superficie de leur culture en pommes de terre aux services du rationnement. Le rendement à l’hectare devait être au maximum des possibilités, les fermiers devaient prendre toutes leurs dispositions pour y arriver. Les cultivateurs du dimanche qui cultivaient leur jardin ou qui louaient une petite parcelle de terrain, étaient soumis à la même réglementation.

       Le nombre décroissant de bétail donnait moins de fumier, moins d’engrais pour les champs. Il n’y avait plus d’arrivage d’engrais naturel venant d’Amérique latine (guano) plus d’engrais chimiques. Les entreprises chimiques travaillaient pour les industries de guerre.



La lutte contre les nuisibles : Il n’y avait plus de fongicides chimiques pour lutter contre les champignons, plus d’insecticides chimiques pour lutter contre les insectes (doryphores et bien d’autres). Il ne reste que le purin d’orties et la bouillie bordelaise, encore fallait-il en trouver, car elle est produite à base de cuivre.



Carte de ravitaillement pour les pommes de terre

       Pour le café introuvable, nous avions de nombreux succédanés qu’il fallait griller dans une poêle, sur une plaque ou dans un grilloir réservé à cet usage. Ces succédanés étaient les glands, l’orge, le soja, le lupin ou toute autre graine qui rappelait de très loin le goût du café. Indiquons pour mémoire qu’en 1942 ils avaient droit à 150 grs de mélange de café par mois, c’est à dire 60 grs de café et 90 grs de succédanés. Il est bon de préciser que les succédanés incorporés officiellement dans le « café » sont l’orge grillée, le malt, les glands , la chicorée, les graines de tomates, et les graines de lupin bleu, les pépins de poires et de pommes, de racines de choux, et de pulpe de topinambours !!

La chicorée : (industrielle ou à café) à grosse racine, cultivée pour la fabrication d'un succédané de café appelé couramment « chicorée ». C'est la racine de la plante, lavée, tronçonnée en cossettes ou râpée, puis séchée, torréfiée et moulue, qui est utilisée. La chicorée, sous forme de boisson combinée ou non au café (le plus souvent chez les personnes âgées), est encore très populaire en Belgique, ainsi que dans le Nord-Pas-de-Calais, au point d'être l'un des symboles de cette région. (Wikipédia).



Le sucre :

       Il se remplace difficilement, mais si on avait du miel on pouvait s’estimer satisfait.

       La saccharine, qui était rationnée elle aussi, remplaçait le sucre. Présentée sous forme de petites pastilles blanches, elle est tirée du goudron de houille. A poids égal, elle sucre 300 fois plus que le sucre. On l’employait également dans la composition  des sirops et des limonades. Elle est d’ailleurs toujours utilisée par les diabétiques.

       Le glucose, était indiqué pour la confection des confitures et surtout pour les gelées. C’était un bon aliment, mais son pouvoir sucrant était trois fois moindre que celui du sucre.

Travailleurs manuels

       Pour le rationnement, il y a trois catégories de travailleurs, plus deux pour les mineurs.



       Le consommateur ne dispose plus que de 1400 calories par jour, alors que les besoins moyens s’élèvent à au moins 2200 calories. Nous sommes arrivés pour certaines catégories de la population dans un état que l’on a appelé un « état de famine lente »

Cartes d’habillement :

Les catégories suivantes de cartes d’habillement sont mises en vigueur :

Cartes d’habillement  A : pour jeunes gens et hommes âgés de 15 ans et plus.

Cartes d’habillement  B : pour jeunes filles et femmes âgées de 15 ans et plus.

Cartes d’habillement  C : pour garçons de 3 à 15 ans.

Cartes d’habillement  D : pour fillettes de 3 à 15 ans.

Cartes d’habillement  E : pour enfants de1 à 3 ans.

Cartes d’habillement  F : pour les nourrissons de 1 jour à 1 an.

       La cartes d’habillement A et B contiennent chacune 80 cases (points) ; les autres, chacune 100 points; la carte F comporte 150 points.

       On réalisa un certain nombre d’économies de tissu : les chemises homme furent raccourcies, la largeur des bas de pantalon fut réduite, les pantalons de golfe furent interdits, ainsi que les jupes-culottes que portaient les dames montant à bicyclette etc.…




Carte pour nourrisson

       Sur le recto de la carte, il y a des tickets de ravitaillement spéciaux. A.B.C.D.E : bon d’approvisionnement pour 183 mètres (200 yards) de fil à coudre mercerisé ou non, ou 90 mètres de fil à coudre en soie naturelle ou en rayonne.

       I.II.III.IV.V.VI.et VII : bons spéciaux dont l’objet et la valeur seront éventuellement déterminés plus tard.

       Les pull-overs à col roulé des enfants étaient détricotés pour devenir un pull à col en V, puis un gilet, suivant ainsi la croissance de l’enfant.

       Les femmes se peignaient les jambes avec un produit (brou de noix), puis, à l’aide d’un petit crayon très gras qui était joint au flacon, traçaient une ligne simulant la couture du bas sur leurs mollets.



Les femmes enceintes :

       Les femmes enceintes pourraient obtenir, sur production d’un certificat médical, les autorisations d’approvisionnement pour les articles suivants : une robe de grossesse ou une quantité correspondante de tissu pour sa confection, deux soutiens-gorge.

Les vêtements de deuil :

       En cas de décès, les membres de la famille du défunt, pourront obtenir des autorisations d’approvisionnement en vêtements de deuil : le mari ou la femme, les parents, les enfants et leurs conjoints, les frères et sœurs les fiancés.

Les trousseaux :

       Sur la production d’une déclaration de publication des bans, les fiancés pouvaient obtenir auprès du service communal des autorisations d’approvisionnement pour les articles indispensables pour un ménage.

Le lait :

       Timbres supplémentaires à partir du 25 juin 1943: les femmes enceintes bénéficiaires de rations supplémentaires du dispensaire auront droit à ces timbres.

       Des timbres de lait peuvent être obtenus par les personnes souffrantes d’ulcères à l’estomac. Leur médecin traitant doit envoyer un certificat médical à l’administration de la santé publique, mentionnant la quantité de lait demandée par 24 heures et pour une période de 10 jours. Le malade recevra les timbres de lait directement du Ministère et doit consentir à se laisser examiner par un médecin chargé à cette fin par le Ministère

A la campagne :

       L’élevage des poules ne se pratiquait pas comme aujourd’hui. Les volailles étaient dans la nature toute la journée et ne recevaient qu’une poignée de grains le soir en rentrant au poulailler. Elles ne pondaient pas en hiver faute de nourriture suffisante. On imposait aux propriétaires de poules de fournir 24 œufs par volaille et par année (si elles avaient été déclarées).

       Lorsqu’un porc, un lapin, des volailles, des bestiaux venaient à mourir, il fallait prévenir le contrôleur du ravitaillement qui venait constater l’exactitude des faits.

       Quand une vache venait d'avoir un veau ou qu’une truie mettait bas, le contrôleur du ravitaillement devait être informé au plus tôt.

Savon aux marrons fait maison :

       Il faut enlever la peau des marrons frais et les râper. Ensuite, on ajoute de l’eau et il faut porter à ébullition. Laisser cuire pendant 2-3 minutes en mélangeant tout ce temps. Filtrer la solution obtenue à l’aide d’une étamine. Ensuite former le savon et le laisser sécher dans un endroit ventilé si possible. Inconvénient : il moisit rapidement.   Il se conserve seulement 2-3 jours. Liquide, cela donne une lessive très bonne pour la laine et les tissus de couleurs fragiles (attention avec les tissus blancs, elle est légèrement jaunissante)

Lessive aux feuilles de lierre :

       Cent feuilles de lierre, 2 litres d’eau. Jetez-les dans l’eau bouillante pendant dix minutes, laissez refroidir, écrasez les feuilles au moulin à légumes à gros trous.  Remettez-les dans le jus, puis passez le tout au-dessus d’un tamis. Dans ce jus tiède, vous pouvez mettre à tremper les soieries, les lainages fragiles, tous les tissus que vous voudrez, exactement comme si vous utilisiez un détergent du commerce.

       Les trucs et les recettes pour remplacer ou économiser le savon furent nombreux, en voici quelques uns.

       Mettre tremper le linge la veille. Il était ainsi plus facile à laver et son usure était moindre puisqu’on le frottait moins.

       Le savon naturel : l’argile (kaolin) ou terre à foulon a la propriété d’absorber les corps gras. On le mélangeait : moitié argile et moitié eau. Pour certains, ce mélange moussait à peu près comme le savon ! Cette argile (kaolin) était étendue sur le linge qu’on foulait et pétrissait avec soin avant de le rincer à l’eau chaude pour obtenir un blanchissage convenable.

       Les évêques étaient chargés de distribuer les rations de savon supplémentaires destinées au lavage du linge d’église dans leurs diocèses. Ils recevaient à cet effet une allocation globale qu’ils répartissaient à leur guise.

       Pour laver le linge fin on a utilisé également les feuilles de lierre et la saponaire.

       On a aussi « coulé la lessive » comme dans l’ancien temps avec des cendres de bois.

       Pour les mains grasses (mécaniciens et autres métiers manuels salissant) : prendre une ou deux feuilles de marronnier, les couper en petits morceaux en y incorporer un peu de marc de café. Les mains lavées avec cette préparation seront propres et douces.

Cartes de charbon :

       Se munir de carte jaune

       Les consommateurs qui par suite de l’importance de leur réserve en combustibles, n’ont pu obtenir leur inscription, pourront le faire entre le 2 et le 5 du mois lorsque leur réserve se trouvera réduite de façon à répondre aux conditions exigées. Les changements de détaillant ne sont pas admis sauf cas de force majeure, (déménagement – nouveaux ménages – cessation d’activité du négociant ou du détaillant). Binche, le 21 avril 1942.

       Extrait de l’arrêté du 22 décembre 1942 établissant l’inscription de certaines catégories de consommateurs en vue de l’octroi d’une ration supplémentaire de combustible à usage domestique.

a)        Les consommateurs- chefs de ménage ou personnes y assimilées assurant au 1 janvier 1943, la garde d’un ou plusieurs enfants n’ayant pas atteint à cette date l’âge de 6 ans accomplis ;

b)        Les consommateurs-chefs de ménage assurant, au 1er janvier 1943, la garde d’au moins six enfants n’ayant pas atteint à cette date l’âge de 18 ans accomplis ;

c)         Les consommateurs- chefs de ménage ayant à la date du 1er janvier 1943 atteint l’âge de 75 ans accomplis ou dont le ménage comprend un ou plusieurs vieillards de cet âge.

       En ville, les gens qui ne travaillaient pas, allaient se chauffer dans les gares, les bibliothèques, les établissements publics.

L’électricité et le gaz :

       Ils furent sévèrement contingentés, aussi bien en ville qu’à la campagne. En ville, tous les consommateurs recevaient une autorisation de consommation qui leur donnait droit d’utiliser un certain nombre de KW d’électricité et de mètres cubes de gaz. Celui qui dépassait la consommation allouée était pénalisé. Il devait payer une amende.



       Les coupures d’électricité et de gaz étaient fréquentes à certaines heures de la journée. Comment chauffer un biberon ou une tasse de tisane ? Il n’était pas question d’utiliser de l’alcool à brûler, qui était rationné et rare. Aussi fallut-il fabriquer de petits réchauds, souvent à l’aide d’une simple boîte de conserve, (choubinette), qu’on alimentait avec des boulettes de papier, posées l’une après l’autre, ce qui pouvait suffire pour faire bouillir de l’eau.

La marmite norvégienne :

       Elle permettait de faire des économies de gaz, d’électricité ou de charbon pour faire la cuisine. Elle avait déjà été utilisée pendant la première guerre mondiale, parfois sous le nom de marmite suédoise.



        Elle était constituée d’une caisse cubique de 50 à 60 cm de côté, en planches ou en contreplaqué. L’intérieur en était garni de plumes, de liège, de kapok, de matières isolantes diverses. Cette couche d’isolation devait avoir un minimum de 10 cm d’épaisseur, le couvercle et le fond étant isolés de la même façon. L’espace central était réservé au récipient. Après avoir fait bouillir le récipient sur le feu, on le retirait rapidement pour l’enfermer dans la « marmite norvégienne » où il continuait à mijoter doucement le temps nécessaire à la cuisson.  Le principe de cet appareil était très simple : l’isolation d’un récipient bouillant du refroidissement de l’air extérieur. L’économie de cuisson était de l’ordre de 60%, ce qui était très appréciable.

Timbres supplémentaires :

       Un arrêté crée en Belgique, le 29 octobre 1940, instaure le « Secours d’Hiver » pour les familles modestes et les indigents.





Feuillet de loterie du Secours d’Hiver, le carnet coûtait 50 francs, pour les moins fortunés le feuillet était vendu à la pièce.

       Le « Secours d’Hiver » entend fournir aux nécessiteux à la fois une aide matérielle et un réconfort moral. Même s’il reçoit des fonds du Trésor public, des dons, et peut organiser des tombolas, son aide n’est, en théorie, pas gratuite. Les difficultés rencontrées par la population en ces temps difficiles nécessitent des interventions de plus en plus nombreuses, notamment une augmentation de la distribution des  « soupes scolaires et soupes populaires » Le « Secours d’Hiver » a choisi l’image de Saint Martin comme emblème.[18]

(Internet Secours d’hiver WWII)



Le tabac et ses ersatz :



Timbres de rationnement pour le tabac

       Le tabac a été très vite rationné. Les cartes étaient valables à l’origine uniquement pour les hommes de plus de 18 ans et ce n’est qu’à partir de 1945 que les femmes reçurent une carte de tabac. Beaucoup de fumeurs de la campagne avaient quelques plants de tabac qu’ils plantaient en fraude. Ils en avaient très peu car ils avaient peur d’être dénoncés et pendant cette période il fallait éviter d’attirer l’attention des autorités.

       Les fumeurs utilisèrent pour remplacer le tabac des feuilles diverses. Chacun avait sa propre recette. Ils se livraient à des mélanges savants : feuilles de pommes de terre, de topinambours, d’armoise, de noyer, de marronnier, etc.…Ils faisaient un boudin de ces feuilles, y ajoutaient parfois une ou deux feuilles de vrai tabac et trempaient ces boudins dans de l’eau légèrement alcoolisée, pour les envelopper ensuite dans un chiffon humide. Ces carottes de « tabac » étaient ensuite mises à fermenter, puis découpées à l’aide d’un vieux rasoirs ou d’un couteau bien aiguisé, alors que les plus ingénieux avaient fabriqué des machines à couper le tabac.

       Les mégots étaient récupérés avec soin, il ne fallait rien perdre. Les plus riches avaient des « boîtes à mégots ». Les autres avaient une simple boîte d’allumettes.

Le papier :

       Le papier fut rationné très strictement. Les journaux parurent sur une demi-feuille seulement.

       Lorsqu’on allait à l’épicerie chercher la ration de pâtes ou de sucre, il fallait apporter leurs sachets ou leurs boîtes vides.

       On réutilisait les papiers usagés : des factures d’électricité ou de gaz ont été imprimées au verso des vieilles cartes d’état-major.

Le coin des bricoleurs :

       Pour remplacer les verres à boire, certains bricoleurs habiles coupèrent des bouteilles de bière ou de limonade. Pour effectuer cette opération, on remplissait la bouteille d’eau froide jusqu'à la hauteur à couper, on entourait la bouteille à ce même endroit d’une ficelle trempée dans de l’essence ou de l’alcool et on y mettait le feu.  La bouteille se coupait généralement très régulièrement et il ne restait qu’à polir les bords avec une lime ou poncer à la meule. Des bonbonnes coupées de cette manière permettaient de fabriquer des saladiers ou des plats creux.

Les voitures et les camions

       Les voitures automobiles, les camions furent réquisitionnés. Seuls les services publics et les transports prioritaires eurent le droit de circuler (médecins, sages-femmes, ambulances, service du ravitaillement) Ils recevaient des autorisations de circuler, des laissez-passer, (ausweis) qu’on devait coller sur les pare-brise.  L’essence était très rationnée et il fallait justifier les kilomètres parcourus.

       Les Allemands ont utilisé de l’essence synthétique, réservée à leur armée. Elle était colorée en brun pour éviter son détournement.

Les pneumatiques

       Le caoutchouc a manqué très vite et fut tout de suite rationné. Il fallait des bons pour obtenir des pneus ou des chambres à air de vélo et les attributions étaient rares. Pour les pneus et chambres à air de voiture et de camion, il fut établi une carte de pneumatiques.

       Pour les vélos on a trouvé un certain nombre de systèmes soit pour en prolonger la durée, soit pour les remplacer. C’est ainsi qu’on a roulé avec des « emplâtres », qui n’étaient autres que des morceaux de pneus usagés qu’on fixait dans le pneu à réparer pour boucher les trous on mettait deux pneus usagés un sur l’autre.

       Ce qui peut paraître incroyable aujourd’hui, c’est le nombre de cyclistes qui étaient arrêtés au bord de la route, en train de démonter leurs pneus pour réparer des chambres à air déjà couvertes de rustines. Parfois on crevait, mais souvent c’était simplement une de ces rustines qui se décollait.

       En ce qui concerne les rustines, elles devinrent introuvables par suite du manque de caoutchouc et de dissolution (colle spéciale). Les cyclistes avaient dans leur sacoche des petits morceaux de vieilles chambres à air et des allumettes : on faisait fondre la bordure de la rustine de récupération et on l’appliquait sur le trou comme pour une vulcanisation.

Les gazogènes :

       Des voitures et des camions furent transformés pour rouler au gaz provenant de la combustion partielle de l’anthracite, du charbon de bois ou du bois. Les combustibles brûlaient à l’étouffée dans un foyer et produisaient un gaz pauvre.



Schéma simplifié d’une installation

       En 1939, l’armée belge reçut de la Défense Nationale au moins 4 camions montés avec gazogène de deux marques concurrentes.

       Tous ces camions furent presque immédiatement envoyés à Liège pour le service des forts, mais loin de toute possibilité d’assistance technique. Ils réapparurent à Bruxelles en février 1940. Les gazogènes Van Hemelryck avaient fait à ce moment chacun plus de 6000 kilomètres, les autres 3000 kilomètres. Les camions repartirent bientôt pour le service des forts d’Anvers où ils essuyèrent le feu des combats.

       Cette technique des gazogènes n’était pas destinée à l’armée en temps de guerre, mais à l’armée en temps de paix, comme moyen d’étude et de vulgarisation.

       Ces quelques lignes sont tirées du livre : Histoire et avenir des gazogènes d’automobiles en temps de guerre par Julien Van Hemelryck. Bruxelles-1959.

       Encore fallait-il se procurer du combustible et des pneus quand ils étaient usés.




Tracteur d’artillerie LATIL


       Il y eut aussi des voitures roulant au gaz de ville. Le gaz était comprimé dans des bouteilles métalliques montées sur le toit des voitures.[19]



Schéma général de l’installation de gaz comprimé.

Les contrôleurs :

       Il y eu tout un réseau d’inspecteurs, de vérificateurs, de contrôleurs, destinés à surveiller l’arrivée des cars et des trains, pour contrôler et fouiller les voyageurs, afin d’éviter le transport clandestin des vivres et d’autres produits. Certains d’entre eux étaient compréhensifs et fermaient les yeux sur les quelques œufs ou sur le poulet contenus dans une valise. D’autres étaient bornés, inhumains, tatillons. Ils étaient secondés par la police et la gendarmerie.



       Maman était une excellente commerçante, très appréciée de tous. Elle partait jusqu’en Hollande. Elle portait un grand manteau dans lequel elle avait cousu des poches dans la doublure. Elle allait chercher du café, du, tabac du beurre, du chocolat. Lorsqu’elle repassait, le douanier lui disait : « il me semble que vous avez bien grossi ».

Tiré du livre réalisé par l’école communale de Slins, La guerre avec un regard d’enfant.

       Les élèves ont rencontré des personnes qui étaient enfants durant la guerre 40-45. Il y a une quinzaine de récits. Aucun ne parle de la faim ou des privations. Il est à supposer que les parents trouvaient des trésors d’ingéniosité, et qu’ils se privaient de bien de choses pour nourrir leurs enfants. Le fait qu’ils vivaient à la campagne devait les aider pour le ravitaillement.




TROISIEME PARAGRAPHE

CONDAMNATIONS EN 1945

       Plus de 52.000 dossiers d’accusation de collaboration économique furent introduits, mais ils ne donnèrent lieu qu’à 1.511 condamnations. En Mai 1941, le gouvernement modifia la loi pénale concernant la collaboration. Cette loi, qui prévoyait la peine de mort pour la fourniture de personnel, d’argent, de vivres, d’armes ou de munitions à l’ennemi, fut assortie d’un paragraphe permettant de tenir compte de la nécessité de maintenir l’activité économique dans le pays, même occupé par l’ennemi, si l’intérêt vital de la population est clairement en jeu et même si cette activité profite directement ou indirectement à l’envahisseur. En tout cas, il était clair dès le début de la guerre que la vie économique du pays devait se poursuivre le plus normalement possible.

ACCUSES DE CUPIDITE

       Les commerçants et les agriculteurs furent l’objet de méfiance de part de la population et furent souvent accusés de cupidité. Des fermiers furent parfois menacés parce qu’ils pratiquaient des prix trop élevés et plusieurs fermes furent même incendiées.

       L’économie parallèle, née de la désorganisation totale de l’économie officielle, fut également grandement encouragée par les Allemands.

HEURES ET MALHEURS

 LA VIE QUOTIDIENNE DES BELGES AU XX SIECLE

MARIE-ANNE WILSSENS

Editeur: Tielt (Belgique), Editions Lannoo, 1999.

L’histoire est toujours écrite par les vainqueurs.



Épices et condiments

       Le sel lui-même était rare et fut sévèrement rationné ; en effet, la côte Atlantique d’où provenait une grande quantité de sel, devint une zone interdite, suite à la construction du mur de l’Atlantique et les inondations des basses terres, rendirent les marais salants inutilisables. Par contre en Camargue, la récolte du sel put continuer à fonctionner à peu près normalement, mais la ligne de démarcation rendait difficile le ravitaillement vers le nord de la France et la Belgique.

       Pour remplacer le poivre, qui était presque introuvable et très cher, on faisait un mélange de 7 à 10% de poivre maniguette, 20 à 25% de coriandre, de laurier, de sauge et gingembre, graines de tomates, romarin, marjolaine et thym. Chacun avait sa recette secrète.

       A la campagne, un coin du potager était réservé aux plantes aromatiques telles que : l’estragon, l’origan, le romarin, la roquette, la sauge, la ciboulette, le laurier, l’aneth l’ail des ours et bien d’autres. Sans oublier les plantes médicinales :

-  Digestion : absinthe, achillée, angélique, aspérule, anis, camomille, citronnelle, fenouil, hysope, mélisse, menthe poivrée, pissenlit, réglisse, sauge, verveine odorante
- Circulation sanguine : arnica
- Nervosité : angélique, camomille, mélisse, millepertuis, valériane, verveine citronnelle, lavande
- Stress : valériane, la lavande, la mélisse, la camomille
- Respiration : bourrache, capucine, guimauve, hysope, mauve, plantains, réglisse.
- Problèmes endocriniens : achillée, armoise, ortie, sauge
- Problèmes hépatiques : pissenlit
- Plants diurétiques : bourrache, pissenlit, prêle.
- Laxatives : guimauve, mauve
- Problèmes de peau : bardane, bourrache,
- Trouble du sommeil : angélique, camomille, valériane.
- Plantes antirhumatismales : citronnelle, ortie, prêle
- Plantes antihistaminiques : plantain
- Pour les yeux : des compresses à la camomille, uncataplasme de pomme de terre
- Mal de tête : décoction d’écorce de jeunes branches de saules 

Tout ceci sont des remèdes de grande mère, utilisé dans une époque ancienne.

Les légumes anciens et oubliés

       On a fait des potages avec de l’ortie blanche, du mouron, de la luzerne, des salades avec des pousses de pissenlit.

       L’ortie : son goût rappelle celui de l'épinard. Elle se prépare comme la plupart des légumes-feuilles, en soupe, en gratin, en quiche, et même en tisane !



Carte d’invitation pour le 40e anniversaire

Invité en envoyant des timbres, N° 1 (pain), N° 3 (margarine), N°10 (viande).

Le topinambour surnommé : l'artichaut de Jérusalem pour son goût



       Les Belges l’ont redécouvert contre leur gré, sous l’occupation pendant la seconde guerre mondiale. Les pommes de terre étaient alors réquisitionnées au titre d’indemnités de guerre, mais pas les topinambours, ni les rutabagas. La même chose c’était passé pendant la première guerre

       Pourquoi ce discrédit quand revinrent des temps meilleurs ? Mais justement parce que les topinambours souffraient d'une image de guerre négative, parce qu'on avait trop souvent dû les manger simplement bouillis à l'eau et de manière répétitive.

       D'autres raisons plus rationnelles militaient en faveur des pommes de terre. Une fois déterrés, les topinambours, légumes d'hiver, ne se conservent pas à la cave, il faut les manger rapidement.

       Les topinambours poussaient tout seuls dans les terres pauvres et il fallait même empêcher leur prolifération le potager en était vite envahi.

       On pouvait les manger crûs (râpés ou en lamelles, avec une vinaigrette moutarde) ou cuits (frits, à l'étuvée, en purée, en gratin, sautés au beurre en fricassée avec des échalotes, en papillote garnie de fruits secs etc.) En les accompagnants de noisettes grillées concassées, ou - pourquoi pas ? - de faînes grillées, on faisait ressortir leur léger goût de noisette.

Les rutabagas



       Qui se souvient encore du rutabaga, ou chou-navet ou chou de Siam, un autre nom exotique de la même famille que le navet ou le radis ? Il se mange en purée, en frites, ou en gratin. Le rutabaga est un plat traditionnel de Noël en Finlande. On peut aussi l'ajouter au pot-au-feu. Ils y en avaient des blancs à col vert comme les canards du même nom, des jaunes à col rouge. Des violets à chair blanche d'une forme parfaite. Il est certain que mangé bouilli à l'eau quotidiennement, le rutabaga n'a rien de folichon.

Le panais



       Le panais : sorte de carotte blanche au goût original qui rappelle celui du céleri-rave en plus doux avec un petit arrière-goût de noisette. Il n'a pas besoin d'être pelé.  Il ne craint pas le gel. Il cuit plus vite que la carotte ou la pomme de terre. Il se laisse arroser de beurre, de miel, de sirop d'érable. La moutarde lui va bien.

       Topinambours, panais et rutabagas accompagnent bien les viandes blanches. Il est une viande qui n'a pas manqué pendant la guerre, c'est le lapin. Même en ville, on en élevait dans les salles de bain ! Dans notre petite maison de Bois-Guillaume, il y a eu deux clapiers dans la cave. Le problème avec les lapins, était de tuer ces pauvres bêtes.

(Internet) LES PAPILLES RACONTENT LEUR GUERRE.

RUTABAGA A LA CREME. – Préparation : coupez un rutabaga en huit, dix ou douze parties suivant sa grosseur, et chaque partie en deux par le travers ; pelez profondément, la peau étant parfois ligneuse. Mettez-les dans une casserole avec abondance d’eau, un morceau de mie de pain, 50 grammes pour absorber l’âcreté, un peu de sel et deux morceaux de sucres. Faites partir en ébullition, écumez, s’il y a lieu et laissez cuire jusqu’au moment où la fourchette pénètre dans la pulpe.



LA CREME : faites fondre 25gr de beurre, mélangez 20 gr de farine, laissez cuire doucement en tournant, assaisonnez, mouillez d’un verre de lait et faites donner un bouillon. Toujours en mélangeant à l’aide d’un petit fouet, ajoutez la même quantité de beurre hors du feu.

COTES DE BETTES A LA CREME. – Vous séparez au couteau la côte de chaque côté de la feuille, puis vous la coupez en morceaux longs de 6 à 8 centimètres en cherchant à enlever le plus possible les fils qui se trouvent le long de la côte. Lavez-les bien, salez et faites-les cuire à eau bouillante. Il faut se servir d’une casserole émaillée et non étamée. Quand ils sont cuits, c’est-à-dire lorsqu’ils s’écrasent sous la pression des doigts, égouttez-les dans une passoire en émail et préparez une bonne sauce blanche dans laquelle vous les versez.

       Ces deux recettes sont tirées du livre « La ménagère 1940 » recette de guerre.  Au début de l’occupation, les ménagères trouvent dans le rationnement de quoi faire ce genre de recettes.

        D’autres livres on été édités plus tardivement, le rationnement s’intensifie et les recettes deviennent plus pauvres. Les prix des marchandises augmentent, mais pas les salaires ou si peu…



Editeur-propriétaire DEJARDIN, 90, rue Hors-Château, Liège

GAUFRES ECONOMIQUES

       1 kilo de pommes de terre, 1/4 de kilo de farine, 1/4 de kilo de sucre râpé, 100 grammes de beurre, ou de margarine, ou saindoux, 2 œufs, les blancs battus en neige, 1/2 paquet de levure. Passer les pommes de terre avec le beurre en purée et ajouter le reste en terminant par les blancs d’œufs. Travailler la pâte encore tiède et cuire au feu comme à l’ordinaire.

BEIGNETS DE POMMES DE TERRE.

       Râper un kilo de pommes de terre, ajouter poivre, muscade, persil haché, lier avec trois cuillérées de farine. Dans la poêle à frire, graissée à l’huile ou au saindoux, déposer et étaler deux cuillérées de la préparation, bien dorer et servir chaud.

GATEAU DE GUERRE AU MAÏS.

       1 tasse de farine, 1 autre tasse de farine de maïs ou semoule, 1 tasse de sucre en poudre, 1 tasse de lait, 1 cuillérée à café de beurre, l’écorce d’un citron haché.  Faire du tout une pâte épaisse mais coulante et cuire à four doux dans une forme à gâteau jusqu’à bonne couleur.

GATEAU D’EPICE AU MIEL.

       1 tasse de miel, 1/2 litre d’eau bouillante, 2 tasses de farine, 1 cuillère à café de levure en poudre, 1 cuillère à café de sel, 4 cuillères de beurre ou de margarine fondus. Ajouter d’abord dans l’eau le miel, puis le reste, sauf le beurre, puis en ajoutant celui-ci, bien battre pendant cinq minutes. Cuire 25 minutes au four modéré dans une forme à gâteau graissée.

GATEAU ECONOMIQUE.

       1/2 kilo de pommes de terre cuites et passées, 200 grammes de sucre, 1 paquet de vanille, 1 cuillère de beurre, 2 œufs, les blancs battus en neige. Mélanger le tout et cuire au four dans un moule à gâteau graissé.

MAYONNAISE SANS HUILE.

       Faire fondre sans brunir : 1 cuillère à soupe de beurre. Ajouter en remuant lentement 2 cuillères à soupe de farine, 1/2 cuillère à café de moutarde, sel, poivre et vinaigre, selon vos goûts. Allonger pour que la sauce ne soit ni trop liquide, ni trop épaisse. Cuire à feu doux et refroidir.

BEURRE ECONOMIQUE.

       A l’aide d’une fourchette, travailler une ration de beurre avec son équivalent de lait, c’est-à-dire 100 grammes de beurre et 100 grammes de lait. Bien malaxer jusqu’à incorporation complète. Saler à volonté.

SAVON SANS GRAISSE.

       Préparez dans un grand récipient le mélange suivant : 300 grammes d’huile de lin, 1 cuillère à soupe de soude caustique, 1/2 litre d’eau de pluie. Faites chauffer à feu modéré en remuant doucement avec une cuillère en bois. Cuisson de 20 à 30 minutes. Si le savon, après refroidissage, ne mousse pas assez, augmentez la dose de soude. C’est en répétant votre fabrication que vous arriverez à de bons résultats.

AUTRES RECETTES DE SAVON

       Préparez le mélange suivant : 1 brique de savon Sunlight ou 150 grammes de savon de Marseille, 1 litre d’eau de pluie, 1/2 paquet de savon en poudre, 1cuillère à soupe de soude caustique. Laisser bouillir et épaissir le tout. Cela suffit largement pour une très grosse lessive.

SPECULATION AU SON

       2 tasses de son, 2 tasses de sucre, 2 cuillères à soupe de miel, 1 cuillère à soupe de bicarbonate de soude, 1 cuillère à café de cannelle en poudre, 1 œuf et une pincée de sel, 150 grammes de pommes de terre cuites et passées, 1 cuillère à soupe de margarine. Mélangez le tout et séchez avec une poignée de farine. Faites de petites boules légères que vous passez dans un peu de farine. Aplatissez les boules sur une platine graissée et mettez un 1/4 d’heure au four.



Editeur responsable : M.C. Haine, rue souverain pont, 27, Liège

LA FARINE DE MARRON

       Vu les difficultés du moment pour obtenir la nourriture en suffisance, j’ai édité cette brochure dans laquelle vous trouvez 9 recettes très faciles à faire étant donné que tous les produits utilisés ne sont pas rationnés. La farine de marron (châtaigne), qui sera employée dans presque toutes ces recettes, contient de nombreuses vitamines et est nourrissante.

Très important. Pour faire disparaitre le goût âcre de la châtaigne, il suffit d’ajouter à chacune de vos pâtes, une cuillerée à café d’anis, par1/4 de kilo de farine. Pour enlever aux crêpes le goût un peu âcre du marron, il suffit d’aromatiser la pâte avec de la vanille, du kirch, du citron, etc., de la faire très liquide et de laisser cuire les crêpes à feu lent jusqu’à ce qu’elles soient bien brunes des deux côté. C’est cette cuisson prolongée qui supprime l’âcreté.

GALETTES.

       Délayer dans 500 grammes de farine de marron, un paquet de levure en poudre. Ajoutez-y doucement de l’eau tiède ou du lait écrémé dans lequel vous aurez délayé un paquet de 100 grammes de sucre vanilliné. Mélangez convenablement le tout jusqu’à ce que vous obteniez une pâte assez coulante.  Graissez le fer et versez-y deux cuillerées à soupe de votre pâte pour une galette. Prix de revient : 500 gr de farine : 12 Fr, 1 paquet de levure : 1 Fr, 100 gr de sucre vanilliné : 2 Fr. Total :15 Fr pour 30 galettes.

GAUFRES.

       Délayer dans 500 grammes de farine de marron, un paquet de levure en poudre. Ajoutez-y votre lait écrémé (ou de l’eau), auquel vous ajoutez au préalable 100 grammes de sucre vanilliné et mélangez le tout convenablement de façon à obtenir une pâte très épaisse (comme pour faire du pain). Laissez lever une heure et coupez votre pâte en petits morceaux, lesquels, après avoir bien graissé votre fer, vous mettrez cuire à feu doux. Prix de revient : 500 gr de farine :12 Fr., 1 paquet de levure : 1 Fr, 100 gr de sucre vanilliné :, 2 Fr., Total : 15 Fr pour 20 gaufres.

GAUFRES AUX CAROTTES.

       Faites cuire 1/2 kg de carottes blanches, égouttez-les et passez-les. Ajoutez ensuite 500 grammes de farine de marron et un paquet de levure en poudre ainsi que 100 grammes de sucre vanilliné. Mélangez fort bien le tout sans y ajouter de liquide, ni lait, ni eau, la pâte étant assez humide avec le jus des carottes. Lorsque la pâte est refroidie, procédez de la même façon que pour les galettes. Prix de revient : 500 gr de farine : 12 Fr, 500 grammes de carottes : 2 Fr, 1 paquet de levure : 1 Fr, 100 gr de sucre vanilliné : 2 Fr., Total : 17 Fr pour 30 gaufres.

GATEAUX.

       Un 1/4 de kilo de farine de marron. Ajoutez deux pommes râpées et un peu de bicarbonate de soude, 100 grammes de sucre vanilliné, un peu de cannelle et une noix de graisse. Travaillez bien le tout, sans y ajouter ni lait ni eau. Ne laissez pas lever et mettez immédiatement au four. Surveillez bien la cuisson.

CONFITURE A L’ORANGE SANS ORANGES.

       Prendre 500 gr de carottes, 100 gr de sucre vanilliné et 1 citron. Cuire les carottes, coupées en petits morceaux, durant une demi-heure environ. Passez-les très finement. Mélangez le tout avec le jus de citron, le sucre et le zeste du citron coupé en petits morceaux (faire attention de ne pas prendre le blanc du zeste qui pourrait donner un goût amer à la confiture). Cuire ce mélange durant 20 minutes et mettre en pots.

ECONOMISEZ 50% DE SUCRE POUR FAIRE VOS CONFITURES.

       Pour réaliser cette économie, il suffit de mettre le sucre, non avant la cuisson, mais au moment ou vos fruits commencement  à cuire.

       Exemple : si pour 1 kilo de fruits vous employez habituellement un demi kilo de sucre, n’en mettez que 250 grammes en procédant comme il est indiqué ci-dessus.

       REMARQUE IMPORTANTE : dans toutes vos pâtes, vous devez ajouter une pincée de sel. Pour les personnes qui en possèdent, elles peuvent ajouter à toutes leurs pâtes, du lait et des œufs, mais cela n’est pas nécessaire, la farine de marron étant très nourrissante.

Farine de châtaigne: farine sans gluten

       (Le gluten est une protéine présente dans les céréales, il influence les propriétés de cuisson de la farine, il absorbe l'eau qui est ajoutée à la farine et gonfle de façon à générer une pâte à pétrir non collante).



       En rédigeant les « recettes d’après-guerre », Popote a tenu compte, dans toute la mesure du possible, des ressources du ravitaillement tel qu’il existait « Il eut été vain de réunir une profusion de séduisantes recettes dont la réalisation n’était possible que pour de rares privilégiés ». Elle croit avoir fait œuvre utile en choisissant au contraire des préparations à la portée de la plupart des ménagères.

Comme avant guerre.

       Les produits Liebig, réapparus dans les épiceries depuis le début des années 1946, sont absolument les mêmes qu’avant la guerre. Les différents produits sont : le cube Liebig, le cube Oxo, et le bouillon Oxo. Les extraits de viande Liebig viennent des usines de transformation implantées en Argentine.

Quand on lit les recettes de ce livre, on peut constater que les légumes, les fruits et les épices sont de nouveau sur les étals des magasins. Le ravitaillement s’est-il amélioré ? Sûrement ! Les cargos arrivent à Anvers, les chemins de fer ont repris du service. « Se qui m’étonne, ce sont les timbres de rationnement N° 1 (pain) datés du 1 du 11 en 1948. Je possède quatre feuilles de timbres et toutes entamées, je suppose que certains articles n’étaient pas encore en vente libre ».



Réception de guerre.

       Les timbres étaient conservés par les ménagères dans de vieux portefeuilles qu’il ne fallait pas perdre ni oublier chez le commerçant, ni se le faire voler. De plus, ils devaient être gardés à l’abri de l’humidité, car ils étaient en papier gommé. Une fois humides tous les timbres collaient ensemble, il fallait les décoller à la vapeur, mais après ce traitement ils ne collaient plus, ce qui posait des problèmes chez certains marchands.



       Si certains restaurants ont remis à leur carte des plats, de légumes anciens et oubliés, les recettes sont nettement améliorées, avec d’autres légumes, des lardons, de la crème, et bien d’autres choses introuvables à l’époque.

Le rutabaga est servi !

FAIRE PART MORTUAIRE HUMORISTIQUE




       Quand on parle du rationnement, on pense toujours à l’alimentation ou à la pénurie de carburant pour les voitures, l’éclairage des maisons est rarement pris en compte.

       A la campagne, les ménages qui n’avaient pas l’électricité pouvaient bénéficier de bougies, de pétrole ou de carbure de calcium, pour les lampes à acétylène. Ceux qui optaient pour le pétrole obtenaient en 1942 un bon d’un demi-litre de pétrole pour le mois ! Ceux qui préféraient les bougies (il y en avait très peu), touchaient un bon pour 1/2 paquet de bougies, c'est-à-dire 500 gr pour le trimestre. Ceci faisait une ration de 5,5 gr par jour, ou une bougie de 18 cm par jour.




       Certains documents de ce texte viennent des réserves du Musée de la Vie Wallonne, que je remercie chaleureusement. (Copyright province de Liège – Musée de la Vie Wallonne)



Ecrit par Monsieur LOUIS DUCHESNE
LE 04/06/2019

 

 

JEU DE L'OIE DE L’ALIMENTATION

RATIONNEMENT PENDENT LA GUERRE DE 14 18



       P.-S. :      Par manque de ressource, dans campagne les enfants allaient cueillir  les fruits des cynorhodons ou cynorrhodon, ils contiennent 20 fois plus de vitamines C que l'orange, mais aussi des vitamines B et PP, de la provitamine A et des sels minéraux. Le cynorhodon possède aussi des propriétés toniques et dépuratives. Débarrassé de leurs pépins, les fruits des cynorhodons se consomment en confiture, en gelées, en marmelade, en tisane, en sirops et en liqueurs, seules ou mélangées à divers autres fruits.

       Valeur pour 100 grammes : 162 calories : 0,3 g de lipides : 4mg de sodium : 429 mg potassium : 38 g : glucides : 1,6 g protéines : vitamine A 4345 IU : vitamine C 426 mg : vitamine B6 0,1mg calcium 169 mg : fer 1,1mg : magnésium 69 mg.



       Bien sur, toutes ces informations scientifiques n’étaient pas connues par tout le monde, mais les anciens connaissaient depuis très long temps les biens faits de ces fruits.

       Il y a bien d’autre plantes sauvage à récolter, dans les champs et dans les prés : ail des ours à ne pas confondre avec les feuilles des muguets (très toxique) ou l’ail des vignes, on peu se tromper avec la dame de onze heures ou le perce neige (tout deux très toxique) : l’oseille sauvage qui doivent être consommées avec modération et est interdis aux personnes qui ont des problèmes rénaux. Les carottes sauvages donc on mange les racines quand elles sont très jeune et les feuilles sont comestibles aussi, à ne pas confondre aves les œnanthes (très toxique) ou la grande ciguë (qui est mortelle).



La carotte sauvage à gauche, la petite ciguë à droite.

       Il y a une grand variété de champignons comestibles, mais là aussi il faut si connaitre, beaucoup sont hautement toxique et même mortelle.

       Tous les documents que j’ai peu consultés sur le rationnement en temps de guerre, ne parle pas de ces plantes sauvages, la confusion avec des plantes toxiques était grande, pouvant entrainer des graves problèmes et même la mort.

 

 

 

 

 

 

 



[1] Farine panifiable est faite avec certaines céréales (blés de différentes sortes, seigle, blé tendre, froment, épeautre, blé de Khorasan. L'engrain (petit épeautre) avec une teneur en gluten sept fois moindre que le blé, il est difficile à panifier si on l'emploie seul. Certaines céréales fournissent une farine contenant du gluten en quantité suffisante pour être panifiable, c'est-à-dire qu'on peut en faire une pâte et donc du pain. (Wikipédia)

[2] Bluter de la farine : séparer la farine du son. On a fait croire au public que le pain blanc était supérieur au brun. La farine a été blutée de façon de plus en plus complète et privée ainsi de ses principes les plus utiles. Mais elle se conserve mieux, et le pain se fait plus facilement. Carrel, L'Homme, cet inconnu, 1935, p. 28.

[3] Terres emblavées : terre gagnée sur les pâturages, pour les ensemencer en blé, ou en toute autre céréale.

[4] Certaines catégories de malades obtiennent des rations supplémentaires de quelques produits ou même double ration de quelques articles. Les femmes enceintes ont aussi des rations supplémentaires.

[5] Il s'agit de la même espèce que la fève d’une couleur brunâtre, plante utilisée depuis l'Antiquité pour l'alimentation humaine.

[6] De vieilles personnes m’ont raconté, qu’ils laissaient suer un hareng fumé (sauret) dans leur cave, pendu à une ficelle et qu’ils venaient frotter leur tranches de pain dessus pour que les tartines prennent le goût.

[7] Les usines qui fournissaient les engrais chimique ont été transformées en usine pour fabriquer des explosifs, pour l’armée allemande.

[8] Certaines radios ont été réquisitionnées par les Allemands. Ceux qui en avaient encore une écoutaient clandestinement (radio Londres). Les programmes d’information étaient rediffusés à 23 heures, principalement pour les prisonniers enfermés dans leurs baraquements, dans les camps de prisonniers.

[9] La cuisine est la seule pièce chauffée de la maison.

[10] Au bain de la Sauvenière (boulevard de la Sauvenière à Liège), il y avait la possibilité de louer à l’heure des salles de bains avec douche ou baignoire.

[11] Les brosses sont faites en fibres végétales, tirées de l'enveloppe de la noix de coco, elles proviennent principalement de l’Asie ou des iles du Pacifique

[12] Toile de chanvre, de lin ou de coton, d'un tissage croisé, fortement serré, propre à faire des tentes, des enveloppes de matelas, d'oreillers, etc., ou à confectionner certains vêtements.

[13] Un ersatz, aussi appelé succédané, est un « sous-équivalent », souvent considéré de moindre qualité, ou bien tout produit de substitution remplissant les mêmes fonctions que l'original. Il s'agit d'une pâle copie, d'un substitut parfois peu, voire pas du tout efficace ou encore d'un sujet dénaturé peu convaincant. (Wikipédia).

[14] Chaussures de cuir grossières à semelle de bois.

[15] Plantes saponaires méconnues, les plantes à savon produisent de la saponine, un agent moussant et émulsifiant. Elles peuvent donc être utilisées comme substituts au savon.

[16] Schlamm : particules charbonneuses de petite dimension qu'on recueille dans des bassins de décantation, du fond des mines et des lavoirs.

[17] Passavant : Permis de circulation de marchandises délivré par l'administration des douanes ou des contributions indirectes.

[18] Durant l’hiver 337, alors qu’il se trouvait à Amiens, il rencontre un mendiant nu et grelottant de froid à qui il donne la moitié de son manteau (on précisera plus tard qu’il n’en donne qu’une moitié car l’autre moitié reste la propriété de l’armée romaine).

[19] Il est obtenu par une combustion incomplète du charbon dans les cokeries, transformant le charbon en coke, pour être livré aux haut-fourneaux.

Une grande partie de ce deuxième paragraphe est copié du livre Histoire du rationnement de la dernière guerre.
Auteur : Raymond Granier
Edition : Scriba

 



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