Maison du Souvenir

Le docteur Carter succomba, le 17 juin 1944 en portant secours au sergent Wawrynovic.

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Le docteur Carter succomba, le 17 juin 1944 en portant secours au sergent Wawrynovic.

53 années plus tard, ce vétéran rencontra le fils de son héroïque médecin !



Le docteur Norval Carter

       Le 17 juin 1944, un capitaine-médecin[1] de 32 ans, le docteur Norval Carter est tué par un snipper alors qu’il portait secours à un blessé, lors de la bataille de Saint-Lo. Il laisse, éplorés aux Etats-Unis, une épouse et deux jeunes garçons. Son épouse s’appelle Emmafern Lowry, surnommée Fernie, elle était son amie d’enfance depuis l’âge de 11 ans. Leurs enfants se prénomment Tom, né en 1937 et Walter Ford, né en 1940.



Le docteur Norval Carter et ses enfants

       Veuve, Fernie ne parla jamais plus de son mari tué à la guerre à ses deux garçons. Sans doute, voulait-elle leur éviter le rappel à chaque fois douloureux qu’ils n’avaient plus de père.

       Elle décéda en 1995 et dans ses affaires, Walter, le fils cadet, retrouva 155 lettres que lui avait envoyées son mari adoré entre 1943 et 1944. Cette découverte remua Walter qui voulut en savoir plus sur les circonstances de la mort de son papa. Il commence alors à lire toute la littérature parue sur le débarquement et la bataille de Normandie. Une chance extraordinaire lui sourit durant l’année 1997.

       En lisant le livre écrit par Gerald Astor, « June 6 1944, Voices of D-Day », il est fasciné par le témoignage[2] du sergent Frank J.Wawrynovic qui, blessé gravement dans la bataille de Normandie, rend hommageau médecin militaire Carter et aux deux brancardiers qui l’accompagnaient. Ces trois hommes, malgré leurs brassards imprimés d’une croix rouge, furent tués par un snipper alors qu’ils venaient d’arriver à son chevet pour lui apporter les premiers soins. Walter est surpris par la découverte du nom du soldat blessé qui fut la dernière personne à avoir vu son père vivant. Il apprend vite que le sergent Wawrynovic est encore en vie et n’a pas de difficultés à trouver son adresse. Emails et coups de téléphone se succèdent et les deux hommes deviennent rapidement amis.



Le sergent Frank Wawrynovic

       L’année ne se termine pas sans un voyage de pèlerinage en Normandie. Après s’être recueilli sur la tombe du docteur Carter dans le cimetière de Colleville (Plot I Row 15 Grave 9), Frank Wawrynovic guida Walter jusqu’à l’endroit exact où il tomba gravement blessé et où le Dr Carter et ses deux brancardiers succombèrent.



Photo (juin 2007) provenant du blog d’un des membres du groupe d’amis essayant de garder vivant le souvenir de la 29e division. Walter Carter est à gauche. La photo est prise à l’endroit où le docteur Carter perdit la vie. Aujourd’hui, dans la commune de Couvains, la route qui relie les départementales 59 et 6 porte le nom de « Captain Carter Road ». L’endroit du drame se situe près du bois de Bretel. Depuis 1997, Walter Carter retourna plusieurs fois en Normandie.

       Frank Wawrynovic mourut en 2005, mettant ainsi un terme à une amitié exceptionnelle avec le fils de l’héroïque médecin militaire mort pour avoir voulu le sauver. Frank était lui-même une personne extrêmement méritante. Résumons sa vie d’homme qui commença avec son engagement. Après un entraînement de deux ans en Angleterre et en Ecosse avec son bataillon de Ranger du 115th Regiment de la 29e Division d’infanterie, il débarqua le 6 juin sur La fameuse plage d’Omaha Beach où il crut bien sa dernière heure venue en voyant le nombre de camarades tomber autour de lui. Le 17 juin, il est envoyé en reconnaissance dans un verger qui séparait deux contingents américains et c’est là qu’il fut gravement touché, à l’estomac et aux deux pieds, par un tir ennemi. Il parvint cependant à ramper pour s’approcher suffisamment près de ses compatriotes et pouvoir crier un appel à l’aide. C’est alors que le docteur Carter avec deux brancardiers (dont hélas, je n’ai pas retrouvé les noms) se portèrent à son secours et connurent la fin dramatique que l’on sait.



Premiers soins sur une plage de débarquement

       Après cet épisode traumatisant, Frank parvint cependant à retrouver des forces pour ramper jusqu’aux siens. Frank endura ensuite 18 mois de convalescence dans différents hôpitaux. Retourné dans la vie civile, il obtint, comme ancien combattant, la possibilité de poursuivre des études. C’est ainsi qu’il acquit des diplômes dans le domaine de la gestion forestière qui lui permirent de créer une entreprise « Utilities Forestry Services » (à Clearfield en Pennsylvanie) spécialisée dans l’entretient des galeries forestières destinées aux lignes à hautes tensions et pipelines. Marié peu après avec une ancienne infirmière militaire, Stella Jedrziewsky, le couple eut trois enfants qui, malheureusement, ne survécurent pas à la petite enfance. Frank et Stella traversèrent cette période extrêmement douloureuse en mettant tout leur idéal au service des démunis. Ils effectuèrent ainsi des dons importants à différentes œuvres et institutions philanthropiques dont certaines aidaient les recherches scientifiques dans le domaine des maladies génétiques. Ils choyèrent le personnel de leur entreprise en lui offrant de multiples avantages sociaux. Mais la générosité de Frank et Stella ne s’arrêta pas là. Après leur rencontre avec Walter Carter, ils contribuèrent, par un don important, à la fondation « Docteur Carter » qui avait été créée en souvenir de l’héroïque médecin par ses confrères afin d’offrir des bourses aux étudiants en médecine de l’université Marshall (Huntington, West Virginia). Dans son témoignage sur le docteur Carter et ses infirmiers, Frank écrivit : « Ces hommes ont accepté mon appel à l’aide et moururent pour moi. Envers eux, je me sentirai toujours très triste et très humble. Leur présence m’est continuelle. Envers eux, j’ai une dette que je ne pourrai jamais rembourser. »

       Frank s’éteignit en 2005 et son épouse en 2013. Peu avant le décès de Frank, en 2004, Walter Carter écrivit un livre (224 pages Publié par Smithsonian) consacré à son père mais, dans lequel, Frank Wawrynovic occupe une grande place.



Couverture du livre écrit par Walter Carter

       Dans les dernières années de sa vie, Frank, toujours tourmenté par la mort de tant de jeunes soldats, écrivit quelques poèmes. Celui qu’il nomme « Sacrifice » constitue la seule conclusion possible à cet article.

Sacrifice

Young men, long gone before their time.
No more to know the warmth of a woman’s love,
or to hear the laughter of child.
No more to see the beauty of the land,
or that of the skies above.
No more to dream of days to be,
or to enjoy the pleasures that life can bring.
Young men, so great your sacrifice.

 

Ces jeunes hommes, ayant quitté la vie longtemps avant son terme normal
Ne connaîtront plus la chaleur de l’amour d’une femme
Et n’entendront plus rire les enfants.
Ils ne verront plus les paysages enchanteurs
Avec les ciels qui les surmontent.
Ils n’auront plus de jours qui se succèdent
Avec les plaisirs que la vie peut offrir.
Jeunes gens, Oh combien grandiose fut votre sacrifice !

(traduction : Dr Loodts)

Dr Loodts Patrick

 

 

Sources :

En souvenir de Frank J. Wawrynovic par Walter F. Carter

En mémoire et avec gratitude à Frank et Stella Wawrynovic

Capitaine Carter KIA 17-06-1944

 

 

 



[1] Durant la guerre, Nerval Carter fut d’abord en poste dans un hôpital en Angleterre, il fut transféré, à sa demande, à la 29ème DI comme chirurgien de bataillon. Après 9 jours en première ligne, il obtiendra déjà les citations de la Croix de guerre avec les médailles de bronze et d’argent et le Cœur de pourpre.

 

[2] En réalité, le témoignage de Frank fut d’abord publié en novembre 1991 dans la revue de novembre 1991 de l’Association de la 29e Division. Il fut repris ensuite dans le livre de Gerald Astor : 6 juin 1944, Voices of D-Day.



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