Maison du Souvenir

L’aviateur Douglas Bader : amputé des deux jambes, il remporte, malgré son handicap, 22 victoires homologuées !

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L’aviateur Douglas Bader : amputé des deux jambes, il remporte, malgré son handicap, 22 victoires homologuées !



L’aviateur Douglas Bader 

       La vie de Douglas Bader peut nous inspirer encore aujourd’hui lorsqu’il nous arrive de perdre confiance en nos possibilités. Douglas est né en 1910. Pendant la Première Guerre mondiale, son père Frederick Roberts s’engage malgré un âge avancé. Il est blessé gravement par un shrapnell tout près de Saint-Omer et sera longtemps soigné. Devenu inapte au service armé, il restera, après la guerre, au service de la Commission des tombes de guerre du Commonwealth en France mais meurt finalement de ses blessures en 1922, à l’âge de 55 ans à Saint-Omer. Il est ensuite, pour des raisons qui nous sont inconnues, enterré en Belgique au cimetière communal d’Evere.



La tombe, de Frederick Roberts, père de Douglas Bader à Evere

       Le jeune Douglas a 12 ans quand son héros de père meurt. Six ans plus tard, il décide de devenir pilote et rentre à l’école de l’air de Cranwell. Au milieu de sa formation, il est classé 18ème sur une promotion de 21 élèves. Suite à une remarque que lui fait l’Air Vice-Marshal Halahan, Douglas décide de s’investir dorénavant corps et âme dans sa formation. Le changement est impressionnant : il termine sa formation deuxième de sa promotion et manque de justesse l’épée d’honneur. Douglas est ensuite affecté au 23ème Escadron sur la base de Kenley. Il vole sur le biplan Gloster Gamecock avant de bénéficier de l’avion Bristol Bulldog plus rapide mais moins maniable comme il va s’en apercevoir à ses dépens.



L’avion Bristol Bulldog avec lequel se crasha Douglas Bader

       C’est en effet avec peu d’expérience de cet avion que, le lundi 14 décembre 1931, Douglas Bader, âgé de 21 ans offre à ses compagnons une démonstration de voltige à basse altitude. Juste après le décollage, Douglas effectue un tonneau et vole sur le dos à très basse altitude. Quand il veut se rétablir, son aile gauche accroche le sol et s’écrase ! La survie de Douglas est miraculeuse mais ses deux jambes sont écrasées. Il est transporté au Royal Berkshire Hospital où le docteur Leonard Joyce est obligé d’amputer les deux jambes, la droite au-dessus du genou, la gauche en-dessous. Douglas survit à cette double amputation et entame alors une longue convalescence à l’hôpital de la R.A.F. d’Uxbridge. Il a la chance d’y rencontrer Marcel Dessoutter, ingénieur aéronautique qui ayant perdu une jambe dans un accident d’avion, avait été le créateur d’une société fabriquant des prothèses de jambes très légères en aluminium.



Marcel Dessouter dans son avion

       Marcel Dessouter obtint sa licence de pilote à l’âge de 18 ans. Un an plus tard, en 1913, sur l’aérodrome d’Easter, lors d’un meeting aérien, il perdit le contrôle de son avion et percuta le sol. Il se brisa gravement une jambe et dut finalement être amputé. Son frère Charles et lui-même mirent alors au point une prothèse en aluminium et créèrent une société qui pris une énorme extension avec la Première Guerre mondiale.

       Douglas sera le premier client à se munir d’une double prothèse. Beaucoup pensent alors qu’il lui sera impossible de remarcher sans canne mais très vite, Douglas leur prouve qu’ils se trompent. Bientôt, il parvient même à jouer au golf et même à danser ! En 1932, il parvient à obtenir un vol dans un Avro 504 d’entraînement. Suite à ce vol réussi sans difficultés, une visite médicale le déclare apte pour des activités restreintes de vol mais quelques mois après, en 1933, il est déclaré inapte au service actif et doit se retirer de la RAF avec une pension d’invalidité. Jusqu’en 1939, il travaillera alors dans un bureau pour une compagnie pétrolière qui deviendra la Shell. En 1935, il se marie avec Thelma Edwards.

       La guerre éclate en 1939 et Douglas brûle de reprendre les commandes d’un avion au service de sa patrie. Il arrive à se faire « pistonner » par son ancien commandant de la base de Cranwell afin d’obtenir sa réintégration dans la R.A.F.

       Il se retrouve alors aux commandes de l’Avro Tudor K-324 puis d’un Fairey Battle et ensuite d’un Miles Master avant de passer sur le célèbre Spitfire. Il est rapidement nommé commandant de l’escadrille 222 à Duxford. Cependant, juste avant sa prise de commandement, il tente de faire décoller son Spitfire avec une hélice qu’il savait mal réglée. L’avion s’écrase au décollage mais Douglas s’en sort. Il reconnaît sa faute et, heureusement, son chef le confirme dans son commandement. En juin 40, son escadrille couvre la retraite de Dunkerke et Douglas remporte sa première victoire sur un Messerschmitt. Un peu plus tard, on le charge de diriger l’escadrille 242 fortement touchée pendant la bataille de France. Quand les pilotes survivants voient débarquer un « handicapé » cul-de-jatte sur leur piste, leur moral ne s’améliore pas ! Mais Douglas réussit rapidement par une voltige aérienne de trente minutes à leur inspirer confiance. Douglas Bader a juste le temps d’entraîner son escadrille de 18 Hurricanes avant d’entamer la bataille d’Angleterre.



Bader, commandant l’escadrille 242 assis sur son hurricane à Duxford Durant la bataille d’Angleterre en Septembre 1940



L’avion Beaufighter

       Bader semble invincible, compte 23 victoires homologuées et est promu lieutenant-colonel. Mais le 8 août 1941, le Spitfire de Bader est abattu par un Messerschmitt au-dessus de Saint-Omer. Il doit sauter en parachute et cela ne se passe pas sans difficultés :

       « Mon coucou pique du nez, et je le vois partir en miettes. Je me retourne : l’empennage a déjà disparu. Il ne me reste qu’à sauter. C’est plus facile à dire qu’à faire : l’appareil s’est mis en vrille et tourne comme une toupie affolée. Je me hisse sur les deux bras. Je réussi à sortir une jambe mais l’autre reste coincée. Je tire de toutes les forces. L’appareil en fait autant, dans l’autre sens. Enfin, je m’arrache : la jambe droite s’est détachée, elle descend avec l’épave. Puis mon parachute s’est ouvert. C’est tout. »

       Douglas est alors transporté par les Allemands à l’hôpital de Saint-Omer. On lui rapporta, extrait de l’épave de son avion, la prothèse qui lui manquait que l’on redressa tant bien que mal. A peine rétabli de ses blessures, il parcourt les couloirs pour remonter le moral de ses compatriotes. Il rencontre le général allemand Galland, le pilote aux 104 victoires aériennes. Adolf Galland, qui lui permet de visiter sa base de Saint-Omer et l’autorise même à monter à bord d’un Messerschmitt.



Le général Adolf Galland

       Le général Galland, très chevaleresque, lui permet aussi l’envoi d’un message radio vers l’Angleterre réclamant de lui fournir de nouvelles prothèses. La R.A.F. profitera d'une mission de bombardement pour parachuter, au milieu des bombes, une caisse contenant son appareillage qui sera bien remis à Douglas.

       Un peu plus tard, Douglas s’évade de l’hôpital avec ses nouvelles prothèses ! La fuite se fait par une fenêtre et à l’aide de draps noués l’un à l’autre. Il est aidé par quatre résistants de Saint-Omer : Lucile de Backer, Gilbert Petit qui portera Douglas sur le dos parce que ses prothèses faisaient trop de raffut, Maria et Léon Hiecque.

       Malheureusement Bader est repris et envoyé en Allemagne tandis que les quatre résistants sont condamnés aux travaux forcés. Bader tente alors de s’échapper à plusieurs reprises de la célèbre forteresse de Colditz. Finalement, ses geôliers lui confisquent ses prothèses pour prévenir toute nouvelle tentative d’évasion.

       La Première Armée Américaine libère les prisonniers de Colditz en avril 1945. Bader reprend du service et dirige l’école de chasse de Tangmere puis le 11ème Groupe de North Weald. Le 15 décembre 1945, c’est l’apothéose de sa carrière : il mène, au défilé de la Victoire, 300 avions dans le ciel de Londres.

       De retour à la vie civile, il parcourra le ciel pour le compte de la compagne Shell. Bien entendu, il est souvent invité à des commémorations et cérémonies. Le général allemand Galland l’invitera même à une réunion d’anciens de la Luftwaffe. Au cours de celle-ci, Douglas lui fit une réflexion qu’il n’oubliera pas, car empreinte d’un humour très british : « Bon Dieu, je ne pensais pas qu'on avait laissé autant d'enfoirés en vie ! ».

       Douglas était aussi un homme au grand cœur. Il se démènera aussi, avec sa deuxième épouse, Joan Murraty, en faveur des amputés, ce qui lui vaut, en 1976, d’être fait chevalier par la Reine Elisabeth. A sa mort en 1982, sa famille, ses amis s’unirent pour fonder une association d’aide aux personnes ayant dû subir une amputation ou étant nés avec un grave handicap ne permettant pas l’usage d’un bras ou d’une jambe. Cette fondation existe toujours.

       Un livre ainsi qu’un film rappelle (1956) aussi son étonnant parcours.




       Le courage de Bader nous impressionne doublement : il y a en effet l’exploit d’un homme qui surmonte tous les obstacles de son handicap mais aussi l’exploit d’un grand pilote de guerre qui risqua maintes fois sa vie. Ce double courage joint à une grande humilité (il reconnaît ses erreurs mais ne s’y arrête pas) lui donne l’aura d’un personnage mythique pouvant inspirer la vie de tout homme immanquablement confronté à la dureté du destin humain. Sachons cependant remarquer que le courage d’un Bader existe aussi aujourd’hui chez nombre de nos contemporains. Les exemples sont multiples. Me vient à l’esprit les exploits en tennis sur fauteuil de Joachim Gérard (Belge) ou de Nicolas Peiffer (Français).



Joachim Gérard contracta la polio à l’âge de neuf mois


Nicolas Peiffer amputé des deux jambes à l’âge de quatre ans

       Pour terminer, n’oublions pas le courage des gens ordinaires qui réussissent, sans aucuns exploits, à donner « la bonne humeur » autour d’eux :

       « Nous la voyons passer, coiffée d’un chapeau de fourrure posé avec désinvolture sur un côté de sa chevelure auburn et nous répondons à ses sourires par des sourires. Car c’est elle la plus jeune de nous tous, même si elle a 93 ans. Elle profite du soleil du printemps. Vieille, frêle, malade, elle profite de la journée, s’inquiète de tout ce qui de passe autour d’elle. « Moi ? Ça va ! Il faut bien n’est-ce pas ? »

       Elle va crânement sous le soleil, ses chagrins enfouis dans son cœur. (Annelou Dupuis)

Dr Loodts P.

 

 



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