Maison du Souvenir

Commémoration de la Bataille de Baulers, le 16 mai 2019.

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COMMEMORATION DE LA BATAILLE DE BAULERS, LE 16 MAI 2019

       Nous fêtons cette année le septante-neuvième anniversaire de la bataille de Baulers et cela depuis 2010. Les villages de Baulers et de Thines occupés par les soldats du 43e RI étaient encerclés par les blindés allemands.



Roger THEVENIN sera âgé de 105 ans le 5 août 2019

       Deux jours plus tôt, l’aviation ennemie avait bombardé le château Bouillon tuant le soldat Claude RICHE du 1er  PAD. Le 16 mai, Roger THEVENIN, caporal du 43e RI, chef de pièce d’un canon de 25 mm, se trouvait du côté d’Alzémont. Un de ses camarades Lucien VAN DAELE avait décidé de partir en reconnaissance, il n’en est jamais revenu. On l’a retrouvé assassiné et enterré par les Allemands dans un champ d’Alzémont. Du côté de la ferme Hanneliquet, attaquée par les chars allemands, Lucien CAUDMONT est tué à bout portant lors de l’attaque d’un char à la grenade, sa section est décimée.

       Roger THEVENIN et le reste de ses camarades sont faits prisonniers et emmenés au centre du village où un simulacre d’exécution est organisé par les Allemands.

       Grâce à l’initiative de l’ASBL « DU COTE DES CHAMPS », en collaboration avec la Ville de Nivelles, cette commémoration est devenue une des plus marquantes du Brabant wallon.

       Depuis dix ans déjà, Roger THEVENIN nous fait l’honneur de sa présence. Bien que très affaibli, il marque sa présence de son aura patriarcal.



Alain MERTENS

       Dès 7 heures, nos quatorze drapeaux sont en place. Le café coule déjà dans les tasses des premiers arrivants. Dès 8 heures, le barbecue est lancé. A la cuisine, la soupe aux carottes et les pommes de terre cuisent déjà.

       Heureusement, la direction du vent empêche les bonnes odeurs de se répandre vers les monuments situés à quelques dizaines de mètres de là.

       Malgré les nombreux désistements pour cause de maladie, une trentaine de porte-drapeaux tant belges que français sont présents. Le soleil qui a compris l’importance de cette journée nous fait le plaisir de sa présence.

       Roger THEVENIN est bien à l’heure. La veille, il a logé dans un hôtel baulersois, accompagné de son fils Jean-Claude et de sa compagne.

       Dès 9h15, sous la baguette d’Alain MERTENS, sous-chef de la Musique Royale de la Marine qui joue quelques airs en attendant la mise en place de la trentaine de porte-drapeaux présents dirigés par Claude COMTE OFFENBACH.



Mise en place des porte-drapeaux

       Le Détachement d’Honneur est composé de huit soldats en armes détachés de la Pharmacie Militaire de Nivelles. Il est en position de part et d’autre du monument 40-45, sous les ordres du Commandant Daniel LEBRUN.

       Au fur et à mesure de leur arrivée, les nombreuses gerbes sont triées et réparties par Jean-Paul ERGO et Christian PATRIARCHE, membres de l’ASBL « DU COTE DES CHAMPS ».

       Les professeurs ont désigné plusieurs enfants pour les porter et les déposer aux monuments.



       Claude MICHEL, Délégué Général du « SOUVENIR FRANÇAIS » distribue des drapeaux aux couleurs françaises que les enfants se font un plaisir d’agiter.

       Tout le monde est en place, Joël fait un petit signe de la tête au bourgmestre, la cérémonie peut débuter officiellement.

       Tout doucement, le silence se fait et le bourgmestre débute son discours :

       « Monsieur le Gouverneur, Madame Mert, 1ère Conseillère de l’Ambassade de France, Monsieur le colonel DEGROOTE et Messieurs les représentants du Commandement de Province, Monsieur le Pharmacien capitaine et autres représentants du 5EMI, Monsieur le commissaire LEBRUN représentant la zone de police, Monsieur le Maire, son adjointe et autres mandataires municipaux de Bruille-Saint-Amand, Madame la directrice et autres enseignants de l’école André Hecq de Baulers, Messieurs les Anciens du 4ème RI, Monsieur le colonel MICHEL, représentant le Souvenir Français, chers collègues du Conseil communal et du CPAS, Messieurs les porte-drapeaux, chers vous tous,

       Je salue particulièrement aujourd’hui la présence de Roger THEVENIN et de sa famille dont je vais vous dire quelques mots.

       En 2010, l’ASBL « DU COTE DES CHAMPS » a répondu à un appel à projets intitulé « Nos Mémoires Vives ». Dans ce cadre, l’ASBL a placé plusieurs panneaux didactiques dans le village. Nous le verrons tout-à-l’heure il y a un grand panneau placé à le ferme Hanneliquet, expliquant la bataille de Baulers et celui placé sur la tombe des trois soldats français morts en 1940, tous ces panneaux inaugurés en 2011. Depuis cette année-là, en parfaite collaboration avec l’ASBL « DU COTE DES CHAMPS », la ville de Nivelles commémore la bataille de Baulers.

       Cette commémoration nous a permis de bien connaître les faits qui se sont déroulés ici à Baulers et de se souvenir des RICHE, BAUDOUIN, CAUDMONT, VAN DAELE, PETITNIOT, VAN WEZEMAELE, CLAES, AVERMAETE, BOURGUIGNON et de rencontrer depuis lors Roger THEVENIN qui est le dernier soldat français du 43 RI qui s’est battu chez nous..

       Roger est né le 6 août 1914, douze jours après la déclaration de guerre. Il a suivi son instruction militaire au 43ème Régiment d’Infanterie de Lille, il était de la classe 34 et est la première victime du passage du service militaire d’un an à deux ans. Le 19 août 1937, alors qu’il lui restait quelques semaines de service à effectuer, il épouse Denise. Fin août 1939, Roger est mobilisé, la guerre est déclarée le 1er septembre de cette année. Il n’assiste pas à la naissance de son fils Jean-Claude le 2 septembre. Ce n’est qu’en février 1940 qu’il a la permission de le voir pour la toute première fois. Ensuite, Roger est trimballé sur les routes de France et de Belgique jusqu’à son arrivée le 13 mai à Hévillers. Le 15 mai, le caporal-chef LIGOT est blessé par des éclats d’obus et Roger endosse la fonction de chef de pièce, d’un canon antichars de 25 mm. Le même jour, il échappe à la mort de justesse alors qu’il porte sur le dos son ami Smagghe qui est blessé et ce jusqu’au poste de secours, tout cela sous les balles ennemies.

       Le 16 mai, Roger est fait prisonnier à Baulers et envoyé au Stalag IIIa pour cinq ans, il est privé de liberté derrière les barbelés, loin des siens.

       Rappelons-nous que lors des combats, Roger THEVENIN a été blessé à la main par un éclat d’obus. Il n’a jamais voulu se faire opérer pour l’enlever et cela en souvenir de ses camarades blessés ou morts au combat.

       Je vous remercie pour votre attention et je cède maintenant la parole à Madame MERT, Première Conseillère de l’Ambassade de France ».



       « Merci beaucoup Monsieur le bourgmestre pour vos mots et pour la présentation de ces parcours de ces hommes qui nous honorent. Mesdames et Messieurs, les Autorités civiles et militaires, Monsieur le Délégué général, Mesdames et Messieurs en vos titres et qualité, chers enfants,

       Je tiens tout d’abord à saluer chaleureusement la présence de Monsieur THEVENIN et de sa famille. Chaque année, il est vraiment important de se remémorer comme vous nous l’avez rappelé Monsieur le bourgmestre, l’engagement et le dévouement de ces hommes en situation de conflit. Je tiens à remercier les autorités communales et la municipalité de Nivelles pour l’organisation de cette commémoration qui est importante et nécessaire chaque année pour l’Ambassade de France, c’est une présence qui nous paraît indispensable et je vous remercie pour ce que vous faites pour nous permettre de préserver la mémoire de notre historie et de ces affrontements sanglants qui au prix de la vie des hommes nous ont ouvert la voie de la liberté, de la démocratie et des droits de l’homme.

       Ces engagements, ceux des jeunes et des moins jeunes, nous leur rendons hommage également ce jour par le témoignage de notre reconnaissance d’avoir fait face à la menace et à l’agression avec courage et dévouement à la nation.

       Je tiens à saluer le travail de chacun, des jeunes en particulier et qui sont nombreux aujourd’hui, je les remercie très chaleureusement, des enseignants et des associations, en particulier le travail de Monsieur FERY, qui aux côtés des autorités maintiennent vive cette flamme de la liberté face à la barbarie.

       Ne pas oublier ce qui s’est passé à Baulers est une responsabilité et un engagement pour préserver la paix inlassablement.

       La mémoire, notre mémoire collective est notre bien le plus précieux. Le souvenir des hommes qui se sont battus ici, les dommages incommensurables, les populations entières et de nombreux pays qui ont été enlisés dans la guerre. Nous le savons tous, il est important de ne pas oublier. C’est pourquoi la jeunesse, les jeunes et les enseignants peuvent nous démontrer comme ils le font aujourd’hui que les leçons de l’histoire doivent être préservées chaque jour dans chaque pays. La transmission de la mémoire nous engage pour faire de notre avenir un idéal de paix et de notre passé un enseignement pour notre démocratie.

       Merci beaucoup pour votre présence et votre participation à cette cérémonie ».

       Le bourgmestre passe ensuite la parole à Roger THEVENIN qui, cette année, préfère rester sur une chaise.



       « Bonjour. Je salue toutes les autorités ici présentes. Excusez-moi si je suis assis mais à l’approche de mes 105 ans, forcément. C’est pas que je ne tiens pas debout, je cours trop.

       Tout le monde sera surpris de me voir encore ici aujourd’hui puisque normalement je suis déjà mort. J’ai écrit un livre « Et moi, je suis déjà mort », et pourtant je respire encore. C’est le ciel qui me fait marcher droit et me garde l’esprit. J’ai encore toute ma tête, mais je ne comprends pas pourquoi. Je suis le seul survivant de la tragédie de mai 1940, ça fait seulement soixante-dix-neuf ans. On se demande ce que je fais encore ici, mais je vous aime tellement, j’ai tellement d’amis, c’est formidable.

       Il me reste un devoir sacré, celui de l’histoire et le souvenir de tous ceux qui sont morts pour la Patrie. Soixante-dix-neuf ans de passé et je suis toujours là.

       Voilà. J’espère bien venir l’année prochaine, forcément ».

       Cette année encore, l’émotion est grande, des larmes qu’on n’ose pas trop essuyer perlent au coin des yeux.

       « J’invite maintenant Madame GLIBERT, la Directrice de l’école André HECQ de Baulers »

       « Madame la première Conseillère de l’Ambassade de France, Monsieur le Gouverneur, Monsieur le bourgmestre, Monsieur le Maire, Mesdames et Messieurs Echevins et Conseillers, Monsieur el Commandant militaire de la province, Messieurs les représentants du 5 EMI et de la police, Monsieur Roger THEVENIN et sa famille, Mesdames et Messieurs en vos titres et qualité, chers membres de l’ASBL « DU COTE DES CHAMPS », chers enseignantes, chers élèves.

       Nous voici à nouveau réunis pour célébrer ensemble, en présence de Monsieur Roger THEVENIN, le 79ème anniversaire de la bataille de Baulers, car le 16 mai 1940, on se battait ici à Baulers.

       Chaque année, depuis 2010, les élèves de l’école communale André HECQ, située ici à Baulers, commémorent, grâce à Joël FERY et son ASBL « DU COTE DES CHAMPS » la bataille de Baulers.

       Commémorer c’est célébrer en souvenir, c’est se remémorer ensemble des événements du passé, ce que nos élèves peuvent concrétiser ici activement en étant associés à cette importante cérémonie. En 2010, Joël, passionné d’histoire locale nous a fournis différents ouvrages qu’il a rédigés et qui contiennent une multitude de documents, de photos, d’illustrations que nous pouvons observer et exploiter avec nos élèves leur permettant de se forger leurs propres images.

       Mais depuis 2012, nos élèves ont l’immense honneur de rencontrer Roger THEVENIN, le dernier combattant survivant.

       En 2013, Roger a eu une attention très particulière envers nos élèves, en confectionnant lui-même ce relais, symbole de la passation du devoir de mémoire, qu’il a gravé pour eux, avec le plus grand soin.

       Relais que Chiara, élève de 6ème primaire s’est vu confié l’an dernier.



Passage du relais

       A son tour, Chiara va le passer à Joëlle, élève de 5ème, qui s’engage, avec l’aide de tous les élèves de nos quatre classes de 5ème et 6ème, à perpétuer ces souvenirs : à ne jamais oublier le sacrifice de Roger et de ses camarades et en entretenir cette mémoire.

       Je vous remercie de votre attention ».

       Les Autorités et les représentants des associations déposent les gerbes aux monuments 40-45 et 14-18, ainsi qu’à la plaque mémorielle PETITNIOT et VAN WEZEMAEL, accompagnés par des élèves de l’école André HECQ chargés de porter les gerbes.

       Comme chaque année, les élèves chantent La Brabançonne directement après la musique du Last Post, jouée après la dépose des gerbes au monument 14-18 par le bourgmestre, le Gouverneur de Province et le Commandant de Province.

       Le cortège se met en place pour se rendre au cimetière. La première partie de la cérémonie se termine. Joël invite les élèves à laisser le passage pour le cortège. Sous les ordres d’Alain, la Musique Royale de la Marine se déplace au pas cadencé. L’Escorte d’Honneur suit, ensuite les porte-drapeaux, les Autorités, les élèves et enfin la population.







Mr. le Commandant militaire de la Province


Mr. le Gouverneur de la Province


Au cimetière de Baulers, un hommage est rendu aux victimes reprises sur le monument 40-45.

       D’abord l’aire mémorielle des trois soldats français est fleurie, après avoir reculé, les Autorités sont en position de respect, la Musique Royale de la Marine restée sur le parking devant l’église, joue Aux Morts, puis la Marseillaise.



Joël FERY, président de l’ASBL « DU COTE DES CHAMPS » explique brièvement aux Autorités comment ces soldats ont trouvé la mort en mai 40.

       C’est au tour ensuite des tombes de CLAES, BOURGUIGNON et AVERMAETE, elles sont dispersées dans le cimetière. La Musique Royale de la Marine joue Last Post suivi de la Brabançonne.

       Le drapeau de l’ASBL est présent et porté fièrement par notre ami Freddy. Notre drapeau porte l’écharpe du SOUVENIR FRANÇAIS auquel nous adhérons depuis plusieurs années.








Ensuite, les participants se dirigent vers la sortie du cimetière où le cortège va se former pour se rendre à la ferme Hanneliquet.


Après une montée de sept cents mètres, le cortège qui s’est étiré au fur et à mesure de la grimpette atteint la ferme Hanneliquet, un des points culminants de Baulers, où les combats ont fait rage.






       Olivier BONFOND, membre de l’ASBL, prend la parole :

« Il y a 78 ans, jour pour jour, les soldats du 43e RI se retrouvent à la ferme Hanneliquet, alors abandonnée, ils manquent de sommeil depuis deux jours et n’ont plus mangé depuis la veille.

       Nous sommes le 16 mai 1940, les soldats se reposent à tour de rôle dans la grange de cette ferme, quand ils sont réveillés par une volée de détonations. La toiture est traversée par un obus de char. La saleté et la poussière volent de partout, des bouts de tuile tombent. En même temps, des rafales de mitrailleuses crépitent. Des balles traceuses de gros calibres viennent, en sifflant, s’aplatir contre les murs.

       Le sergent Lucien CAUDMONT est envoyé en reconnaissance avec sa section, il doit rapporter des renseignements sur les chars ennemis. Il ne reviendra pas de sa mission et sa section sera décimée.

       En 1945, Philippe GRIFFART, le meilleur ami de Lucien, adresse une lettre à sa famille et y explique les circonstances de sa mort :

       « Le lendemain de la mort de Lucien, j’étais arrêté dans un petit village couché sur un trottoir quand tout-à-coup je me sentis réveiller par un sergent de sa section m’annonçant cette triste nouvelle, je ne pouvais en croire mes oreilles. De suite j’ai été trouvé son chef de section qui était cantonné dans une rue voisine, lui demandant de plus amples détails. Il me répondit ceci : « Nous avions devant nous des chars ennemis qui devaient nous attaquer d’un moment à l’autre, ils étaient dans un petit bois devant nous. Caudmont fut envoyé en reconnaissance avec son groupe avec mission de rapporter quelques renseignements et aussi de se défendre à la grenade contre les chars s’ils se trouvaient en présence d’eux. C’est ce qui se produit. Nous avons vu Caudmont tomber et devant l’attaque imposante de chars nous nous sommes repliés. De son groupe, quelques hommes seulement ont pu rejoindre nos lignes, nous apportant la confirmation des morts […].

       Puis je n’ai plus rien su jusqu’au jour où je fus prisonnier dans une espèce de couvent, j’étais couché à côté d’un soldat du 43 et la première chose que je lui ai demandé : quelle compagnie es-tu ? Il me répondit de la 1ère - donc tu connais le sergent Caudmont – je pense bien me dit-il c’était mon chef de groupe. Pour savoir si le malheur était réel car j’en doutais encore un peu, je lui ai demandé : qu’est-il devenu, est-ce qu’il est prisonnier – Il me répliqua : « Non malheureusement il n’est pas prisonnier ; j’étais à côté de lui lorsqu’il est tombé. Nous nous sommes trouvés en présence d’un char et Caudmont en tête de son groupe a ordonné l’attaque du char à la grenade, il a donc couru vers le char pour se mettre le plus rapidement possible dans son angle mort afin de placer une grenade sous les chenilles mais le char manœuvra sa tourelle rapidement et le frappa d’une balle en plein front, la mort fut instantanée, sans aucun cri, aucune plainte, aucune souffrance ».

       Les faits se sont passés entre 19 et 21 heures. Ultime hommage à leur chef de peloton, ses camarades ramènent son corps et le déposent dans la cour.



       Lucien est né le 9 janvier 1920, il a à peine vingt ans. La veille de sa mort, alors qu’il subit durant toute la journée des tirs de mortier et des bombardements de Stukas, il écrit encore à ses parents :
« Bien chers Parents,
« Tout va bien »
« La santé est bonne »
« Le moral est d’acier »

       Dans son portefeuille, transpercé par des morceaux de shrapnel, Lucien gardait précieusement une photo de lui au dos de laquelle sa petite sœur Jacqueline, alors âgée de treize ans, avait écrit un petit texte prémonitoire :
Petit frère chéri, Lucien,
Cette photo me rappelle mon grand frère comme je l’ai connu
Son regard doux semble me dire « Ne m’oublie pas »
Son regard triste semble comprendre que la vie est de courte durée
Je t’aime petit frère chéri, je pense à toi
»



       Les Autorités déposent ensuite les gerbes de fleurs devant la plaque commémorative de Lucien CAUDMONT, tué lors de l’attaque d’un char à la grenade, lors d’une reconnaissance avec sa section qui sera décimée.




Les Autorités ont reculé sur une ligne, en position de respect. La Musique Royale de la Marine joue Aux Morts, la Marseillaise complète et la Brabançonne pour terminer.








       Lors des remerciements des porte-drapeaux, au nom de l’ASBL DU COTE DES CHAMPS, Joël FERY offre à chacun d’eux un pin’s de l’ASBL reprenant les indications de son drapeau.

       La cérémonie terminée, la ville offre le verre de l’amitié dans la cour de la ferme Hanneliquet, dont le propriétaire actuel est la famille HAUTHIER que je remercie au passage pour nous avoir autorisés à occuper les lieux.







Durant l’apéritif, la Musique Royale de la Marine nous offre un petit concert, dont la marche des Chasseurs Ardennais, Sambre & Meuse et On the quarter deck. Vraiment super !



       Le porte-drapeau Patrick de DORLODOT était présent avec un drapeau très particulier puisque confectionné en l’honneur de l’officier gendarme, le lieutenant-colonel Arnaud BELTRAME assassiné en mars 2018 à Trèbes, dans le sud-ouest de la France, par Redouane Ladkim, un Français d’origine marocaine de 25 ans, fiché pour radicalisation islamiste, alors qu’il s’était livré en échange de la libération d’otages.







COMPTE-RENDU DES COULISSES DE LA COMMEMORATION

       LE REPAS DU 16 MAI 2019

       Depuis la veille au matin, les membres de l’ASBL « DU COTE DES CHAMPS » sont en effervescence. Il faut faire les courses, préparer la salle, mettre les tables, ranger les boissons au frais au bar, préparer la vinaigrette et le beurre à l’ail, laver les pommes de terre, installer les panneaux d’exposition, la sono, ...

       A 18h00, tout est en ordre.

       Le lendemain, Geneviève accueille les premiers arrivants avec une tasse de café et des biscuits.

       Olivier B. assure le service au bar. Olivier F. est responsable du barbecue qu’il a fait allumer dès 7h45, il est aidé de Freddy et de Jacques, il faut cuire trois cents morceaux de viande.

       A la cuisine, Françoise s’active avec Manola pour préparer la soupe aux carottes. Jean-Marie et Philippe ont placé les drapeaux de l’ASBL, ils se rendent à Hanneliquet pour dresser les tables pour l’apéro. Louis est à la plonge, il sera aidé plus tard par Axelle. Christian et Jean-Pol sont chargés de trier les bouquets de fleurs et de s’occuper de Roger THEVENIN.

       L’après-midi s’est bien déroulée en la compagnie de Roger THEVENIN qui nous a une fois de plus surpris par son esprit resté vif.

       UN ONE MAN SHOW, A MOURIR DE RIRE

       « Que le temps a passé, 105 ans dans deux mois et demi... un don du ciel. Faut le faire, et puis il fallait que je vous retrouve tous. Voilà, c’est formidable de vous retrouver comme ça.

       L’année prochaine évidemment je ne serai plus là, c’est déjà un don du ciel d’être arrivé jusqu’à mon âge. Je n’ai jamais fait comme tout le monde.



       Si vous saviez comme je suis content de pouvoir tous vous retrouver, j’avais dit « Roger il faut y arriver », c’était mon dernier objectif et cet objectif je l’ai réalisé. J’ai toujours réalisé tout ce que je voulais, c’est formidable ! J’en ai fait des choses sans m’en rendre compte, sans le vouloir et sans mérite, sans mérite. Mon objectif c’était dans la vie... je crois qu’il y a un seul mot qui a compté c’est donner, donner, on ne donne jamais assez dans la vie et j’ai toujours donné.

       D’après mon docteur il m’a dit « De toute façon vous êtes déjà mort, je ne comprends pas comment vous respirez encore, j’ai beau voir votre cœur, votre état général, vous êtes mort ».

       Et je l’ai marqué dans mon livre « Et moi je suis déjà mort ». Eh bien, je respire encore ! Ce n’est pas normal. Mais pourquoi je respire ? Parce que je devais encore vous voir pour la dernière fois, je peux vous dire que les dernières années de ma vie ont été les plus belles parce que vous êtes toujours été là à mes côtés.

       Caroline qui me regarde. Ca va Caroline ? Oh je l’aime bien cette petite Caroline elle est d’une gentillesse formidable, par contre son père...

       Il est là ? Oh, excuse-moi !

       Je crois que je n’ai plus rien à dire si ce n’est que j’ai vécu mes dernières années d’une façon formidable et je vais pouvoir partir en paix retrouver Denise Tu m’entends ? Il y a deux ans elle était là avec nous. Dernièrement j’ai rêvé, elle disait : « Roger, t’en as mis du temps à venir me retrouver ? » Je crois qu’il est temps que j’y arrive quand même. Voilà c’est tout merci, je vous aime tous.

       Applaudissements soutenus.

       Merci, je ne mérite pas autant, j’ai toujours fait de travers dans ma vie. J’ai fait que des bêtises mais des bêtises qui ont été payantes, quand même

       Je tenais à venir à Baulers une dernière fois là où je me suis battu. Je remercie le ciel qui m’a permis d’être encore là Merci, je vous aime, vous avez été formidables, vous m’avez fait passer les derniers moments de ma vie d’une façon sensationnelle Je vous regarde, vous êtes tous là, merci. Comme disait celui-là « Merci d’être venus si nombreux ».

       Roger chante ensuite à sa façon une chanson pour Caroline et sa sœur intitulée « Nouveau bonheur » de Maurice Chevalier.
Depuis le jour où mon destin
M'a fait te rencontrer Caroline sur mon chemin
Le ciel est pour moi plus nouveau
Les fleurs, les oiseaux, les reflets de l'eau
Sont encore plus beaux
Oui, tout est pour moi plus enchanteur
Depuis le jour où j’’ai connu Caroline et sa sœur
J'éprouve près de vous trop d'émoi
Pour rester maître de moi
Je sais, tout nous sépare, et pourtant
Je pense à vous tout le temps
Oui, tout est pour moi plus enchanteur
Depuis le jour où dans mon cœur
Depuis le jour où j’ai connu Caroline et sa sœur
... et vous tous

       J’ai l’impression d’être toujours la vedette comment ça se fait ? Hein

       [S’adressant au papa de Caroline et d’Isabelle] Ca va toi ? C’est moi la vedette. A Baulers tu dis ce que tu veux, mais ici c’est moi le roi.

       Roger entame ensuite une version raccourcie de « On a le béguin pour Célestin », d’Alibert

Petit enfant dans mon berceau
J'étais déjà très beau
Depuis en vérité
Ça n'a fait qu'augmenter
Des femmes de tous les pays
Je suis le favori
La petite minouche
Et le coco chéri

On a l'béguin, on a l'béguin pour ma silhouette
Ma taille de guêpe, mon esprit et mon maintien,
On a l'béguin pour la couleur de mes chaussettes
On a l'béguin, on a l'béguin pour Célestin

Lorsque j'arrive au restaurant
Tout le monde est à son rang
Pour me regarder passer
Dans mon veston pincé
La dame du monde est ébahie
La servante ahurie
Répand partout la sauce du rôti

On a l'béguin, on a l'béguin pour ma silhouette
Ma taille de guêpe, mon esprit et mon maintien,
On a l'béguin pour la couleur de mes chaussettes
On a l'béguin, on a l'béguin pour Thévenin

       Après cette journée, tout est remis en place et nettoyé. Comme chaque année, les membres de l’ASBL se retrouvent dans le bar pour achever les restes de midi.

       Cette année, un petit seau de déchets est distribué aux poules de Christian. Il n’y a pas eu de gaspillage, c’est formidable.

Rédigé par FERY Joël

 

 

 

 



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