Maison du Souvenir

Un résistant peu commun : Arthur Francotte.

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UN RESISTANT PEU COMMUN : ARTHUR FRANCOTTE


Monsieur Arthur Francotte

       Il nous a été donné de recevoir de nombreux documents au sujet d’un résistant de Hermée peu commun : Arthur Francotte, malheureusement décédé en février 2009. C’est son fils Jean qui nous a remis cette mine de renseignements. Pourquoi peu commun ? C’est en France qu’il a fait partie d’un maquis.

Lors de son décès, un discours a retracé ses faits d’armes. En voici un extrait.

       Soldat milicien de la classe 38, Arthur Francotte, membre du Régiment des Forteresses de Liège, a d’abord participé à la campagne des 18 jours.

       Affecté successivement aux forts de Pontisse puis d’Eben-Emael, il a connu le statut de prisonnier de guerre du 2 juin 1940 au 30 octobre 1941. Après s’être évadé, Arthur Francotte est devenu membre actif des forces françaises de l’intérieur et a donc connu la vie du maquis pendant près de 3 longues années. C’est en Auvergne, et plus précisément ai Mont Mouchet qu’il a connu des moments particulièrement difficiles. Il avait coutume de s’y rendre en « pèlerinage » annuel en compagnie de son épouse (qu’il avait rencontrée le 7 décembre 1944 – le jour de son retour en son village natal de Pontisse).


Mais qu’est-ce que le maquis du Mont Mouchet ? En voici un petit historique.

       Dans un paysage grandiose, au cœur de la France, à 1 400 mètres d’altitude, aux confins des départements du Cantal, de la Lozère et de la Haute-Loire, se trouve le Mont Mouchet.

       En ce lieu, fut implanté à partir du 20 mai 1944, sous l’autorité du Colonel Gaspard, Chef régional des F.F.I. de la zone R6, l’un des cinq grands Maquis de France.

       C’est dans une clairière de cette belle forêt de la Margeride que siégeait l’Etat-major régional. A proximité se trouvait le point principal de ralliement, à Clavières, où un panneau indiquait aux arrivants : « Ici commence la France libre ». Quelque 6 000 hommes « prirent le maquis » dont 2 700 au Mont Mouchet même.

Comment fut choisi le Mont Mouchet ?

       Un rapport adressé au B.C.R.A. à Londres en 1943 proposait d’installer plusieurs « réduits » dans les régions montagneuses de la Zone libre, notamment en Margeride, aux confins du Cantal, de la Lozère et de la Haute-Loire, à condition d’avoir l’assurance formelle des Alliés d’être ravitaillée en armement et munitions.

       A partir du 1er janvier 1944, l’imminence du Débarquement et les problèmes posés par la présence de très nombreux « maquisards », notamment dans la Région 6, firent que le Comité Central d’Action en France et le B.C.R.A. soumirent au général De Gaulle différents plans, notamment le plan « Caïman » accepté le 16 mai 1944. Celui-ci prescrivait aux F.F.I. les buts qu’elles devraient s’efforcer d’atteindre. Décision fut prise d’une mobilisation partielle et d’un regroupement dans trois « Réduits », dont le Mont Mouchet.

       Des milliers de « Maquisards » se dirigèrent alors vers la Margeride. Les compagnies occupèrent les emplacements prévus. L’Etat-major s’installa dans la maison forestière, détruite pendant les Combats. Reconstruite, elle abrite aujourd’hui le Centre d’Accueil.

       Ce maquis avait pour instruction de retarder par tous les moyens la jonction des troupes allemandes du Sud avec celles de Normandie en particulier, afin de faciliter l’avance des Alliés.

       Le 2 juin 1944, un bataillon allemand se dirige sur Le Malzieu et attaque le Mont Mouchet sur son flanc sud. Il subit des pertes par ses 2ème et 3ème Compagnies et le Corps Franc des Truands, auxquels se joignent des éléments de la 12ème Compagnie et le Corps Franc Laurent.

       Le 10 juin, trois groupements tactiques de la Wermacht, forts de 2 200 hommes et avec l’appui de blindés et de l’aviation, convergent vers le Mont Mouchet par l’ouest (Saint-Flour) le nord (Langeac et Pinols en Haute-Loire) et l’est (Le Puy et Saugues, en Haute-Loire également). Ils tentent de prendre au piège l’ensemble du dispositif. Des combats violents ont lieu durant toute la journée. Les Compagnies s’accrochent au terrain et obligent l’ennemi à se retirer sur les bases de départ.

       Le 11 juin, l’attaque allemande reprend avec d’importants renforts. Les combats sont acharnés mais, faute de munitions, le colonel Gaspard donne, le soir, l’ordre de repli. Les Compagnies se retirent donc sur le Réduit de la Truyère par le sud, tandis que celles de Saugues et de Venteuges gagnent les forêts de Mercoire et de la Chaise-Dieu. Quand les Allemands atteindront, bien plus tard, la petite maison forestière du Mont Mouchet, ils ne retrouveront rien … ni hommes, ni matériel.

       Au cours des opérations, les Allemands pillèrent et incendièrent de nombreux villages et fusillèrent aussi des habitants (55). Enfin, 25 otages furent exécutés le 14 juin à la sortie de Saint-Flour.

       Le 20 juin au matin, quatre Groupements tactiques attaquent le Réduit de la Truyère, dotés d’un armement lourd : chars, artillerie, aviation. Partout, la bataille fait rage et plusieurs villages sont détruits. Devant la puissance de feu de l’ennemi, l’Etat-major des F.F.I. se résout à donner l’ordre de décrochage, à la tombée de la nuit.


       Le Service de Santé, encerclé à Saint-Just, vit six résistants gravement blessés et trois accompagnateurs sanitaires froidement exécutés.

       Au cours de ces batailles, les pertes des F.F.I. furent sévères : 238 tués et 180 blessés, ainsi qu’une centaine d’otages civils tués par les nazis.

       Du côté de ceux-ci, les pertes furent également importantes.

       Les compagnies F.F.I. reconstituées en 20 zones de guérilla harcelèrent les troupes allemandes un peu partout en Région 6 et, avec les F.F.I. du Limousin et de la Nièvre, forcèrent les 22 000 hommes de la Colonne Elster à capituler au confluent de l’Allier et de la Loire, au « Bec d’Allier ».

       C’est ainsi, après beaucoup de sang coulé et de larmes versées, que l’Auvergne fut totalement libérée de l’occupant, dès septembre 1944 et que certains Maquisards poursuivirent le combat aux côtés des alliés jusqu’à la capitulation finale de l’Allemagne, le 8 mai 1945.

Et Arthur Francotte, que lui arriva-t-il ? Qu’indiquent ses états de service ?

       « Participation à la campagne du 10 mai 1940 au 28 mai 1940.

       Prisonnier des Allemands du 29 mai 1940 au 1 juin 1940.

       Prisonnier de guerre en Allemagne (au Stalag XIII A NDLR) du 2 juin 1940 au 30 octobre 1941.

       Evadé d’un camp de captivité le 21 octobre 1941.

       Repris en force au Ministère de la Défense nationale et en congé de repos du 1 octobre 1944 au 31 décembre 1944.

       A été reconnu résistant armé du 1 septembre 1943 au 27octobre 1944. »

       C’est le 27 novembre 1944 qu’il est rapatrié de Paris. Et nous connaissons la date exacte de ce rapatriement puisque sept ans plus tard, notre brave Arthur Francotte reçoit une lettre datée du 15 mars 1951, émanant du Commissariat au rapatriement, lui réclamant 340 francs belges pour le remboursement des frais encourus par l’Etat belge ! Magnifique reconnaissance des services rendus pour concourir à la liberté de nos pays !


Sabotage aux Ancizes[1]

       Réparée à la hâte, à la suite du sabotage partiel opéré par les résistants au début de l'hiver 1943, l'aciérie des Ancizes, en ce début d'année 1944 a repris sa production et des trains entiers d'acier sont acheminés vers l'Allemagne.

En novembre 1943, Raymond Labaune (Irma) et Camille Leclanché (Buron) ont reçu l'ordre de saboter le château d'eau et le transformateur électrique qui alimentaient l’aciérie des Ancizes. La charge d'explosifs était insuffisante et l'opération n'avait causé que des dommages relatifs, rapidement réparés.

A la suite de cette tentative, la surveillance s'était accrue dans l'enceinte de l'usine et des projecteurs dirigés sur le château d'eau et le transformateur avaient été installés.

       La production d'acier, à destination de l'Allemagne, avait repris son cours et devant ce constat, les Alliés parlaient de bombarder le site. Répondant à  l'urgence, le premier corps franc a alors pris la décision de procéder à un nouveau sabotage.

Dans un premier temps, se faisant passer pour des policiers français, Émile Coulaudon (colonel Gaspard) et Jean Rustan (Tarzan) se sont introduits dans la loge des gardiens de l'aciérie et ont confisqué leurs armes... sous prétexte qu'elles n'étaient pas adaptées à l'importance de leur mission.

       Parallèlement, des contacts ont été noués avec la direction de l'usine, favorable à la résistance, et les maquisards ont appris que la seule destruction du château d'eau suffisait à paralyser la production pour de longues semaines.

       La nouvelle opération a donc été fixée au mois de février. Le soir prévu, par un froid sibérien, Raymond Labaune et Edmond Leclanché (Antonio), qui avait pris la place de son frère Camille, arrêté par la police française et livré à la gestapo quelques jours auparavant, ont acheminé, du hameau d'Espinasse aux Ancizes, un conteneur de 50 kg de plastic destiné à la destruction de leur objectif.

       Assistés, au sol, d'Abel Martinon et de Jean Rustan, il leur a fallu hisser au sommet du réservoir, leur encombrant paquetage. En équilibre sur une corniche de 30 cm de large, il ne leur restait plus qu'à relier le conteneur à un cordon destiné à la mise à feu et à le jeter dans l'énorme masse d'eau.

       Redescendus par l'échelle de fer, les maquisards ont enfin réglé le crayon détonnant, sûrs qu'aucun ouvrier ne se trouvait dans les parages, et 15 minutes plus tard, à l'abri, ils ont entendus un énorme bruit sourd suivi d'une superbe gerbe d'eau qui a irisé le ciel de milles couleurs... jusqu'à 50 mètres de hauteur !

       La mission s'est déroulée sans encombres et comme prévu, la production de l'aciérie à été stoppée net pendant près  de deux mois, faisant perdre aux Allemands 3.000 tonnes d'acier spécial destinées à leur aviation ! L'élément indispensable à l'activité ayant été pulvérisé, les Alliés ont finalement renoncé à bombarder l'usine.

 

 



[1] Extrait du journal « La Montagne » du 27 février 1994.



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